Page:Landry, Manuel d’économique, 1908.djvu/121

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Il y a des risques généraux, comme ceux qui tiennent à la possibilité d’une crise affectant tout un marché ; et il y a des risques particuliers, qui n’existent que pour une entreprise, ou pour une affaire intéressant une entreprise.

Les risques peuvent être des risques de gains, ou des risques de pertes, ou des risques combinés de gains et de pertes. Ce sont, dans cette classification, les deux dernières catégories qui sont les plus importantes. On connaît ces risques de pertes qui résultent de la possibilité d’incendies détruisant des bâtiments ou des marchandises, ou encore de la possibilité d’inondations, de coups de grêle, d’épizooties. À ces risques on peut rattacher ceux qui naissent de la possibilité d’accidents ou de la possibilité, encore, d’une mort prématurée. Et pour ce qui est des risques combinés de gains et de pertes, il suffira d’indiquer ceux que font courir à tous les producteurs les perpétuelles variations des prix des marchandises, et ceux que font courir aux propriétaires de valeurs mobilières les variations de la cote de la Bourse.

Qu’est-ce donc au juste que le risque ? Tout d’abord, il est nécessaire de bien voir qu’il correspond seulement à une ignorance où nous sommes, qu’il est un aspect et comme une extériorisation de quelque chose de purement subjectif. On a essayé parfois de proposer une conception objective du risque, en se fondant sur la possibilité du calcul des probabilités, sur la « loi des grands nombres ». Mais quelque grand nombre que l’on considère, jamais on ne sera en droit d’affirmer que le rapport des résultats d’un jeu de hasard, par exemple, sera exactement ce qu’indique le calcul des probabilités. Que la réalité se conforme à ce que veut le calcul des probabilités, cela ne sera jamais que probable. Au vrai, les événements sont rigoureusement déterminés par leurs causes : pour quelqu’un qui connaîtrait parfaitement celles-ci, et qui serait en mesure d’effectuer sur elles les calculs nécessaires, le résultat d’un coup de dés à jouer serait aussi sûr que si ce coup avait été joué déjà ; tout comme aussi, si le coup est joué mais que les dés soient restés couverts, il y a risque à parier. Comme l’a dit fort bien Fisher, tout fait sur lequel il y a risque à se prononcer est comme une pièce sur laquelle on aurait joué à pile ou face, et que la nature tiendrait dans sa main fermée.

53. De l’estimation des risques. — Comment convient-il que nous nous comportions devant le risque ? Nous considérons d’abord, à ce sujet, le cas le plus simple, à savoir le cas dans lequel la loi des grands nombres, comme on l’appelle, trouve son application la plus parfaite.

Soit une partie qu’on nous propose. La mise qu’il nous faut avancer est de 5 francs ; notre gain, si nous gagnons, sera de 10 francs, soit le double de la mise ; et les chances de gain et de perte sont égales : l’issue du coup, par exemple, nous sera favorable ou défavorable selon qu’une bille s’arrê-