Page:Landry, Manuel d’économique, 1908.djvu/101

Cette page a été validée par deux contributeurs.

On dira, quand la courbe de l’utilité d’un bien est longtemps à tomber au niveau du zéro, que la consommation de ce bien est élastique. Cette formule, à la vérité, est employée surtout à propos de la consommation globale de tous les acheteurs d’un marché. Mais rien n’empêche qu’on l’emploie aussi à propos d’un individu.

42. Le bénéfice du consommateur.[1] — Quand un individu cherche à acquérir, d’une manière ou de l’autre, un certain bien, il lui est possible, ordinairement, de s’en procurer une certaine quantité moyennant des sacrifices inférieurs à ceux qu’il serait disposé à supporter. Prenons le cas le plus fréquent aujourd’hui, à savoir celui de l’individu qui achète sur le marché ce qu’il désire. Une marchandise, à l’ordinaire, n’a qu’un prix, à un moment donné et dans un endroit donné. Soit donc un individu qui désire un bien d’une certaine sorte ; le prix de l’unité est 5 francs ; notre individu, d’autre part, paierait 35 francs pour avoir une première unité, 15 francs seulement pour en avoir une seconde, 5 fr. 50 pour une troisième, et 2 francs pour une quatrième : dans ces conditions, il est clair qu’il achètera trois unités du bien en question ; et chacune de ces unités aura pour lui une utilité qui dépasse le coût de l’acquisition.

Si l’on suppose un bien qui puisse être l’objet d’une division indéfinie, notre individu s’arrêtera dans ses achats au moment précis où la courbe de l’utilité coupera la ligne du prix ; et alors la dernière quantité infinitésimale aura une utilité égale à son coût.

L’avantage que l’acheteur trouve, pour la plus grande partie de ce qu’il achète, ou même pour tout ce qu’il achète, à payer l’utilité des biens moins cher qu’il ne consentirait à faire à la rigueur, l’excédent, si l’on peut ainsi parler, de l’utilité d’un bien sur ce qu’il coûte, a reçu le nom de rente du consommateur. Cette appellation est critiquable. Il convient, en effet, de réserver le nom de rente pour désigner certain concept que nous définirons plus tard. Mieux vaut parler ici du bénéfice du consommateur[2].

Le consommateur a un bénéfice, dans le sens qui vient d’être indiqué, toutes les fois qu’il achète une certaine quantité d’un bien. Pour qu’il y eût exception à cette règle, il faudrait que la courbe de l’utilité du bien acheté devînt exactement horizontale ; il faudrait encore qu’une unité seulement étant achetée, et cette unité étant indivisible, l’achat se présentât comme une opération indifférente ; ou il faudrait imaginer une courbe montant d’abord, descendant ensuite, et telle que l’achat le plus avantageux fût simplement indifférent. Mais de telles suppositions sont irréelles ou n’ont pratiquement aucune chance de se réaliser. En revanche on peut,

  1. Voir Cunynghame, Geometrical political economy, chap. 6, et Marshall, Principles, liv. III, chap. 6, §§ 1-2 (trad. fr., t. I).
  2. Cunynghame propose l’expression « consumer’s surplus value ».