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préférait à toute autre cette façon de le donner. Si donc il vécut en solitaire, ce ne fut ni un indifférent, ni un égoïste.

Brahms détestait le monde. Il ne se plaisait qu’avec ses intimes, dans les derniers temps avec Rillroth, Hanslick, l’éditeur Simrock, le compositeur Johann Strauss. Avec eux, il aimait à se retrouver au vieux restaurant du « Hérisson rouge ». Avec eux, il était familier, cordial, joyeux. Aux autres il cachait sa vraie nature, son vrai caractère sous un voile de brusquerie, d’humeur agressive et de sarcasmes. N’est-ce point à lui qu’on prête ce propos ? Il sortait d’un salon et, se retournant gracieusement avant de franchir la porte : « S’il est ici quelqu’un que j’ai oublié de blesser, aurait-il dit, je lui en fais toutes mes excuses. » Il y a bien de la brutalité dans cette boutade. Si l’anecdote ne paraît point très vraisemblable, elle donne au moins une idée très exacte de l’opinion qu’on se faisait à Vienne des manières de Brahms.

En réalité, Brahms n’attaquait que pour se défendre, pour sauvegarder son indépendance à laquelle il tenait par-dessus tout.

Dans le fond, il n’avait pas l’instinct combatif. Et il le prouva à l’occasion de l’interminable