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et un honnête homme, une nature rude, mais affectueuse. Et il éprouvait au plus haut degré le besoin d’être aimé. À certains égards il semblait né pour la vie familiale. S’il ne s’est point marié, il l’a regretté toute sa vie. Du reste, il a expliqué, à sa manière, pourquoi il est resté garçon : « À l’époque où je me serais le plus volontiers marié, mes compositions étaient sifflées ou du moins accueillies très froidement. Je supportais cela très bien, parce que je savais exactement ce qu’elles valaient et ce qui en adviendrait dans l’avenir. Et lorsqu’après de tels échecs je rentrais dans ma chambre solitaire, ça n’allait pas trop mal. Mais s’il avait fallu, à de tels moments, me présenter devant une femme, voir ses yeux interrogateurs anxieusement dirigés sur moi, et si j’avais dû lui dire : « Encore une fois, ça n’a pas marché », — voilà ce que je n’aurais pas pu tolérer. Et, en effet, quelque amour qu’une femme eût éprouvé pour moi et quand même elle aurait, comme on dit, cru en moi, elle n’aurait jamais pu tout de même avoir la certitude de ma victoire finale. Et si elle avait voulu me consoler… ah ! je ne peux pas y penser, quel enfer c’eût été alors pour moi ! » Beaucoup de timidité et d’orgueil à la fois, il n’y a rien