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XXIX

HISTOIRE D’UN GÉNIE DES EAUX.



Dans la province de Nghé an, au village de Minh làng, vivait une femme nommé Thi hon, dont le mari s’appelait Le van phuoc. Cette femme, âgée d’environ vingt ans, était très jolie. Sa maison se trouvait au bord du fleuve. Un jour que son mari était absent et qu’elle était seule avec une jeune sœur, un génie des eaux vint frapper à la porte comme s’il était le mari. La femme lui ouvrit, et le génie déguisant sa voix, sans lui laisser le temps d’allumer la lampe, se mit à lui exprimer tout le désir qu’il avait eu de la revoir.

Or, en ce moment un voleur vint se tapir derrière la porte et y trouva la peau de serpent dont le génie s’était dépouillé et qu’il avait laissée là. Sans trop savoir ce que c’était, il la prit et la rapporta chez lui où il l’examina. C’était une peau de couleurs variées, jaune, verte, rouge ; notre homme la cacha dans sa maison. Quand le génie voulut se replonger dans le fleuve il chercha sa peau, mais ne put la trouver et fut forcé de rentrer dans la maison. La femme alluma sa lampe et reconnut que ce n’était pas son mari, mais un mauvais esprit. Elle et sa sœur s’enfuirent tout effrayées et se mirent à appeler au secours. Le génie aurait bien voulu se sauver, mais ayant perdu sa peau il fut forcé de rester là, tapi dans un coin sombre. Les gens du village, accourus aux cris de la femme, le saisirent et voulurent l’interroger, mais il baissait la tête et ne répondait pas. Ils résolurent donc de le mettre à la cangue et de l’amener aux autorités.

Comme la troupe avait fait la moitié de la route, deux grands serpents à crête rouge sortirent de l’eau et s’opposèrent à son