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tune[1]. Il alla remercier Quinh et lui porter des présents. Celui-ci riait toujours, tout content d’avoir joué ce bon tour.

  • Quinh invita un jour les mandarins de la cour à venir chez lui. Il les reçut à merveille, leur offrit à boire. Pendant ce temps ses serviteurs dans sa cour frappaient sur des billots de bois, ayant ainsi l’air de faire des hachis et de préparer un grand festin. À l’aide de ce stratagème il retint les mandarins toute la journée sans manger, mais, en revanche, les fit tellement boire qu’ils tombèrent sous les tables. Il les fit alors rapporter en ayant soin de les envoyer chacun dans une maison autre que la sienne et en recommandant aux porteurs de les porter jusque dans leur lit, de crainte qu’étant ivres il ne leur arrivât quelque malheur. Grâce à cette précaution, les mandarins se réveillèrent dans le lit de leurs collègues.
  • Un jour Quinh fit interdire l’entrée du marché pendant trois jours sous le prétexte qu’il voulait y étaler ses livres pour les faire sécher. L’on accourut pour voir cette vaste bibliothèque, mais l’on ne vit que Quinh qui s’y était couché le ventre à l’air. Quand on lui demanda où étaient ses livres il répondit qu’ils étaient dans son ventre[2].

Quinh était plein de finesse, mais cependant il fut joué une fois par un des gardiens des portes. Celui-ci se mit dans un palanquin semblable à celui du doc hoc[3], et, se faisant suivre par deux ou trois soldats qui jouaient le rôle de l’escorte, portant des parasols, une longue pique, etc, il se rendit à maison de Quinh.

  1. Dans le Chuyên doi xwa la chose à voir est installée dans une île, et le passeur fait fortune à transporter les curieux.
  2. Le ventre est le siège de l’esprit. Un Européen dans un cas pareil montrerait son front.
  3. Directeur de l’enseignement d’une province.