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tellement savant qu’il sera reçu aux examens ; à vingt ans, il entrera dans la carrière des emplois et chaque jour deviendra plus honoré. »

Tuân se réveilla et raconta son rêve à sa femme. Les deux époux furent transportés de joie et cessèrent de se plaindre. Quand vint le terme de la grossesse, la femme mit au monde un fils qu’ils appelèrent Giai. Il avait tous les traits du mendiant et ses yeux enfoncés. Un devin[1] du Nord, qui se trouvait dans le pays, fut appelé pour l’examiner. Il dit que tous les traits de cet enfant étaient ceux d’un mendiant, mais que ses yeux étaient admirables ; qu’à partir de l’âge de dix ans, il serait d’une intelligence remarquable, qu’à vingt ans, il serait docteur, à trente gouverneur de province, qu’il serait élevé à la dignité de thiéu bâo[2] et mourrait à l’âge de soixante-treize ans.

Nguyèn dang giai fut donc un enfant donné par le Bouddha. Aussi, quand il eut été élevé aux honneurs, se fit il faire en or les statues des trois Bouddhas ; il leur rendait partout un culte et le soir psalmodiait ses prières (comme un bonze). Où qu’il allât exercer ses fonctions, il les emportait avec lui. Par la suite, quand il fut devenu gouverneur de Hà nôi, il leur bâtit une très belle pagode où se trouvent aussi sa statue et celle de sa femme.



  1. Thây twong. Devin qui prédit l’avenir par l’inspection des traits de la physionomie ou de certaines marques extérieures du corps.
  2. Thiéu bâo, petit protecteur. Ce titre paraît emprunté à l’antiquité chinoise ; il désignerait l’aide précepteur du prince héritier, tandis que thai bâo, grand protecteur, désigne le précepteur même.