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XVI

HISTOIRE DE CÔ BU.



Sous le règne de Minh mang vivait dans le Nghè an un certain oncle Bu qui était un devin fort habile[1] et un guerrier émérite. Au moment de sa naissance, il avait trois poils blancs sous la plante de chaque pied, aussi plongeait-il comme personne, pouvant même rester plusieurs jours sous l’eau. Il suscita une rébellion et se fortifia sur la montagne Truông mày dans un lieu escarpé où l’on n’osait aller l’attaquer. De temps en temps, il descendait dans la plaine pour piller, prenant aux riches pour donner aux pauvres. Tous les misérables se rendaient en foule auprès de lui et il les secourait tous. Qui voulait rester avec lui restait, qui voulait le quitter pouvait partir. Bien qu’il ne fut qu’un rebelle, il se conduisait vertueusement parce qu’il voulait par la vertu parvenir à l’Empire.

Un jour du dizième mois, l’oncle Bu alla au village de Long phan pour visiter les tombeaux de ses parents et porter de l’argent à sa famille. Le thôn truong courut en avertir le huyên, et celui-ci prévint le gouverneur de la province qui envoya deux mille hommes pour saisir le rebelle. Les hommes étaient accompagnés par dix éléphants et portaient des filets de fer pour envelopper l’oncle Bu.

On tendit donc ces filets tout autour du village. Le commandant de la troupe les fit surveiller avec soin et entra dans

  1. Thây dôn ; le mot dôn, nhâm dôn, désigne un mode de divination dans lequel la supputation des années et des éléments auxquels elles se rapportent joue un grand rôle. Ces supputations se font en comptant sur les phalanges des doigts (NDM, 59), ce qui explique la définition de Theurel : Veneficium quod fit numerando digitis. Cet art fait l’objet d’un traité en six volumes intitulé : Ky môn dôn giap dai toan.