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Le père fut saisi de frayeur et descendit au plus vite. Sa femme revint et le réprimanda, « Je cherchais, dit-elle, à faire de votre fils un prince dominateur du monde, mais lui et vous vous avez voulu qu’il ne fût que le premier lettré[1] d’une époque de troubles. À votre guise, mais pour moi, vous ne me reverrez plus. » Ce discours achevé, elle disparut.

Le père et le fils demeurèrent ensemble. À dix-sept ans Trinh alla passer ses examens à la cour des Mac[2] et fut reçu avec le titre de trang nguyèn ; mais comme il était intérieurement partisan de la dynastie Lè, il feignit d’être malade et resta chez lui sans vouloir occuper d’emploi dans l’administration des Mac. Par la suite il fit semblant d’être aveugle et se retira dans une pagode.

Lorsque les Mac vaincus se retirèrent à Thâi nguyèn, Trinh envoya son frère Trai au secours des Lè, lui disant de s’adresser à lui lorsqu’il se trouverait dans quelque difficulté. Trai était son demi-frère, né de la même mère, mais d’un autre père. Il habitait le Thânh hoa, avait passé ses examens à la cour des Lè et avait aussi obtenu le titre de trang nguyèn. Mais son génie était de beaucoup inférieur à celui de Trinh qui, en toutes choses, était le maître et lui marquait la conduite à tenir. Seulement Trinh, qui avait passé ses examens chez les Mac, ne voulait pas les servir et dirigeait son frère qui servait les Lè. Quant à lui, feignant d’être aveugle, il vivait dans une pagode.

Lorsque les Mac eurent de nouveau été battus et refoulés jusqu’à Lang son, Trai envoya un émissaire à son frère pour lui demander ce qu’il fallait faire. Le messager vint à la pagode de Trinh, mais celui-ci, pendant trois jours, ne lui donna aucune

  1. Trang nguyèn.
  2. Il est très difficile de rapporter les événements contés ici à l’histoire des Mac, telle qu’elle se trouve dans l’Histoire annamite, de M. Truong vinh ky.