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devenus aussi gros que la jambe. Un jour que l’un d’eux rampait dans l’herbe auprès de la femme, celle-ci, éblouie par le grand soleil, ne le vit pas et lui donna par mégarde un coup de pioche qui lui coupa la queue.

À la vue du sang la vieille se mit à pleurer et à appeler au secours, le mari accourut et, transporté de colère, il la frappa. Il prit ensuite dans ses bras le serpent mutilé et le l’apporta à la maison où il le pansa. En trois ou quatre jours il guérit.

Les deux époux se dirent : « Ces fils des autres maintenant sont grands ; nous, nous sommes vieux et faibles, nos sens ont perdu leur force ; nous ne pouvons plus nourrir les enfants d’autrui, rendons-les à ceux à qui ils appartiennent. » Ils rapportèrent donc les deux serpents a l’endroit où ils avaient trouvé les œufs et là ils crièrent : « Gens de là-bas ! nous avons élevé vos enfants ; maintenant les voilà grands, nous vous les rapportons. » Un bouillonnement se produisit dans le fleuve et les deux serpents disparurent.

Trois jours après, au soir, ils virent venir deux hommes richement vêtus qui les saluèrent et leur dirent : « Vous nous avez élevés. Le roi notre père nous a ordonné de venir vers vous et de vous dire que maintenant vous êtes vieux, vous n’avez pas besoin de travailler davantage. Lorsque à l’avenir vous aurez besoin de quelque chose, riz, vêtements ou quoi que ce soit, vous n’aurez qu’à parler et vous aurez de suite l’argent nécessaire. Quand le terme de vos jours sera arrivé, nous nous occuperons de faire vos funérailles comme les hommes.

Par la suite ces deux serpents devinrent les génies de deux villages ; l’un occupe un mièn du village de Xuàn canh, l’autre un mièn du village voisin. Ces deux mièn sont situés dans la montagne et séparés seulement par un torrent. Lorsque la sécheresse règne dans le pays, les notables du canton se réunissent