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INTRODUCTION.

céder, qui nous choquerait fort aujourd’hui, avait du bon, il faut le reconnaître : elle était une puissante garantie pour ceux qui faisaient bâtir et ne pouvait contrarier que les faiseurs, gens peu dignes d’intérêt dans tous les temps.

Au XVIe siècle, le maître de l’œuvre semble avoir grandi en importance, et c’est évidemment à l’invasion des artistes italiens qu’il faut attribuer ce progrès. Ces peintres ou sculpteurs étrangers, Rosso, Primatice, Della Robbia, venaient de trop loin pour se laisser confondre avec des « maîtres maçons ». Chargés de la haute direction des constructions royales, ils s’attribuèrent la qualification d’architecte, et tracèrent ainsi entre eux et les ouvriers une ligne de démarcation qui profita ensuite aux artistes français. Nul doute que c’est à ces précédents que Philibert De l’Orme dut d’être créé par Henri II « surintendant des bâtiments royaux », charge considérable, dépassant de beaucoup i’importance qu’avait eue jusque-là un simple maître d’œuvres.

Cependant, en réalité, les deux rôles d’architecte et d’entrepreneur, qui n’en avaient fait qu’un pendant longtemps, se confondaient encore dans l’exécution des grands travaux de la fin du XVIe siècle : les six entrepreneurs qui, en 1600, travaillaient à la grande galerie du Louvre, étaient Pierre Chambiges et François Petit, jurés du roi en l’office de maçonnerie ; Isaïe Fournier, graveur et architecte ; Guillaume Marchant, architecte du roi ; Pierre Guillain et Robert Marquelet, architectes de la ville.


Ce travail ne serait pas complet si j’omettais d’indiquer le rôle d’initiateur joue par les architectes français à l’étranger[1]. À partir de Philippe-Auguste surtout, époque où la nationalité française se dégage des éléments divers dont elle s’est formée, on voit surgir à la fois et se développer parallèlement une langue,

  1. Il n’était pas possible d’aborder ce chapitre sans consulter le livre écrit sur ce sujet par M. Dussieux : Les Artistes français à l’étranger ; c’est ce que j’ai fait, et je dois dire que bon nombre de faits relatés ici sont empruntes à cet excellent travail.