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DICTIONNAIRE

l’architecte Célerier. (Loiseau, Not. hist, sur Bélanger. — Thiéry.)


BÉLIER (Charles), architecte français, réfugié à Hei-

    au ministre de l’intérieur Chaptal. J’en donne ici la copie textuelle : « Citoyen ministre, je vous fais cette lettre à vous seul, elle appelle toute votre attention. C’est auprès du lit de la célèbre Arnould expirante (elle ne mourut pourtant que le 22 octobre) que je la trace pour vous etre adressée. Cette femme meurt prixée des secours que son état de détresse ne lui permet pas de se procurer. Vous lui aviez accordé une représentation à son bénéfice au théâtre des Arts ; des gens obligeants lui en avoient offert 1,200 francs. Vous aviez ensuite désiré que cette permission fût retirée et échangée contre une offre de lui faire donner 6,000 francs ; elle en a reçu 4,000. Les 2,000 francs qui lui sont encore dus lui seroient du plus grand secours ; mais à qui s’adresser pour dégager votre parole ? L’agent comptable du théâtre des Arts prétend qu’il lui faut de vous un ordre particulier, qu’il ne peut rien délivrer sans cet ordre. Et cette malheureuse femme, de laquelle Gluck disait : « Sans le charme des accents et de la déclamait tion de Mlle Arnould, jamais mon Iphigénie ne serait entrée en France », cette infortunée se trouve aujourd’hui privée même des moyens de prolonger sa vie, faute de secours ! Que diroient les Montcrif, les Rousseau, les Dalembert, les Diderot, les Helvétius, le baron d’Holbach, et tous ces hommes célèbres qui avaient tant recherché sa société intime (et desquels on trouvera la correspondance) ? Que dirait Voltaire lui-même, qui, à l’âge de quatre-vingt-deux ans, se fit porter chez elle et traça ces vers sur son buste :


    Ses grâces, ses talents, ont illustré son nom ;
    Elle a su tout charmer, jusqu’à la jalousie ;
    Alcibiade en elle eût cru voir Aspasie,
    Maurice Lecouvreur, et Gourville Ninon

    Cette femme si abandonnée a vécu pour la gloire du théâtre ; elle a vécu au milieu des savants, elle a vécu pour faire du bien aux infortunés, elle a vécu en laissant des modèles et des élèves à la scène, qu’elle a embellie et même créée ; les savants ont immortalisé ses talents et son esprit, et pourtant cette femme meurt faute de pouvoir