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chaine, et que si nous voulions aller sur notre terre, il s’agissait de ne pas tarder davantage.

« Le conseil était bon, aussi le lendemain quittions-nous Duck Lake dans un « democrat » (voiture légère à quatre places) que son garçon d’écurie conduisait, un jeune Canadien de 20 ans, aventureux et décidé comme tous ses compatriotes. On nous avait donné une voiture, car vu la fonte des neiges, les traîneaux n’étaient plus d’emploi. Mais les malheureux chevaux n’allaient guère vite pataugeant dans la boue, et nous mîmes deux heures pour arriver au fleuve.

« Mais là, pas moyen de passer, la glace du bord étant déjà partie. Il nous fallut remonter plusieurs milles en amont pour aborder le champ de glace et traverser, ce qui s’opéra sans encombre ; malheureusement peu de temps après un des chevaux fut pris de coliques, et avant de lui avoir trouvé un remplaçant, la journée était fort avancée.

— Nous en serons quittes pour coucher à la réserve indienne, dit philosophiquement notre conducteur qui, heureusement, parlait français, nous allons y arriver dans une couple d’heures ; le surveillant nous fera bien une petite place chez lui, je suppose.

La perspective d’aller camper parmi ces coupeurs de scalps qui, 15 ans auparavant, durant la « Rébellion », avaient massacré à plaisir, ne nous souriait guère. Cependant nous ne dîmes rien jusqu’au moment où nous atteignîmes les bois de la dite réserve lesquels, vu la brunante, nous parurent sinistres, alors je me hasardai à demander si le surveillant avait beaucoup de soldats avec lui.

Aucun, fut la réponse, il n’a d’autre compagnie que celle de sa vieille (sa femme). Les soldats, eux, sont à Duck Lake : quatre, en tout, de la Police Montée, y compris le sergent ; vous les connaissez d’ailleurs