Page:Lamy, Féron - Dans la terre promise, paru dans Le Soleil, Québec, du 21 nov au 17 déc 1929.pdf/141

Cette page a été validée par deux contributeurs.

leurs sans savoir, quand, là, il vivait avec du bon monde et dans une maison excellente… il resta.

Nous avons dit que le temps avait été le plus beau qui fût possible… mais trop beau, trop chaud et trop venteux quelquefois, si bien que le sol s’asséchait et durcissait d’une façon alarmante. Depuis le commencement d’avril un seul petit orage était venu rafraichir la terre. On avait dit à Placide qu’en ce pays de l’Ouest on pouvait toujours ou presque, compter sur les pluies du mois de juin. Mais voici que juin était venu, voici qu’on en était au 15, et pas une goutte d’eau ne tombait d’un firmament toujours sans nuage.

L’engagé s’était remis à la charrue pour faire le labour d’été, et dès le premier jour il avait remarqué que la terre était très sèche et passablement dure ; tant et si bien que quatre jours après on dut mettre sur la charrue les cinq meilleurs chevaux.

Mais quelque chose de plus alarmant survenait : le blé, par taches trop grandes, jaunissait ; plus loin, dans l’avoine, de grands ronds noirs se dessinaient, et plus nettement de jour en jour : les vers !

Ce fut de là que naquirent les premières inquiétudes du fermier nouveau.

L’engagé, toutefois, demeurait encourageant.

— Il va pleuvoir dans quelques jours au plus tard, disait-il souvent. Hier, j’ai entendu les coyotes glapir, c’est bon signe. Et puis, avez-vous remarqué la nouvelle lune ? elle penche ses pointes vers la terre… signe de pluie !

Placide doutait un peu de la véracité de ces données météorologiques rudimentaires, et il doutait d’autant plus de la puissance des coyotes et de la lune à tirer l’eau du ciel, que celui-ci demeurait un continuel miroir. Sans doute, quelquefois des nuages apparaissaient sur l’horizon, mais c’était pour retraiter peu après.

Si les grains souffraient de la séche-