Page:Lamy, Féron - Dans la terre promise, paru dans Le Soleil, Québec, du 21 nov au 17 déc 1929.pdf/128

Cette page a été validée par deux contributeurs.

de l’argent pouvaient toujours s’en tirer. Mais les autres qui n’avaient rien, pas même leurs frais de retour à Québec ou aux États-Unis, que pouvaient-ils faire ?

Ce fut le découragement, puis la débandade.

Notre ami, Placide Bernier, comme on le pense bien, était là. Il fut le premier à rebrousser chemin et à revenir à Prince-Albert. Quarante environ de ses compagnons de voyage le suivirent, oui, mais ceux-ci avaient un petit capital au moins.

Et ceux qui n’en avaient pas… ?

Ah ! c’est là qu’on put voir combien l’argent manquait et combien il eût été nécessaire. Même « Dans la terre promise », l’argent est indispensable. Et ceux-là qui trainaient après eux une famille le sentirent davantage. Ils arrivaient en un pays où tout… tout était à faire et ils ne possédaient rien pour faire quoi que ce fût ! Est-ce qu’avec rien on peut faire quelque chose ?

On se posait la question…

Toutefois il n’y avait pas de tâtonnements à faire, il importait de se tirer le mieux possible de ce mauvais pas.

Placide et ses compagnons, tuyautés par un compatriote, se dirigèrent vers Tisdale, à 90 milles à l’Est de Prince Albert, là même où ils étaient passés venant de Winnipeg et où ils avaient pu remarquer une contrée invitante. À trente-cinq milles de Tisdale et vers le Nord-Est quelques familles anglo-canadiennes de l’Ontario venaient de fonder la colonie d’Arborfield. La terre, quoique boisée, mais de jeunes trembles et jeunes saules seulement, y étaient, disait-on, d’une richesse à nulle autre pareille. Un homme actif pouvait s’y tailler un beau domaine en peu d’années.

Nos amis trouvèrent le pays de leur goût et tous se choisirent un homestead chacun.

Placide Bernier choisit le sien, lui aussi, mais il ne devait pas l’habiter tout de suite, et voici pourquoi. À