Page:Lamy, Féron - Dans la terre promise, paru dans Le Soleil, Québec, du 21 nov au 17 déc 1929.pdf/125

Cette page a été validée par deux contributeurs.

peu à l’écart de la scierie et en deçà, la haute fournaise, peinte en rouge, qui consume les déchets de bois apportés du moulin par un conduit muni de chaines. À voir, dans le jour gris, ce haut fourneau tantôt fumant, tantôt projetant de vives lueurs à travers son dôme treillissé on croirait découvrir un phare vigilant ; il a aussi l’aspect d’une tour crénelée qui défendrait l’approche de quelque château seigneurial. Plus loin et hors des dangers de l’incendie les yeux se posent, non sans quelque étonnement encore, sur d’innombrables et hautes piles de planches et de madriers soigneusement alignés.

C’est un tableau tout à fait nouveau pour le plus grand nombre de nos voyageurs. Leur émerveillement du jour précédent est en partie revenu, et ils espèrent qu’ils vont bientôt rentrer dans « La vie ». Mais là, c’est « la vie des bois » ; et eux, venus pour « la vie des champs », (ils n’imaginent guère que la plupart d’entre eux devront se faire bucherons avant de pouvoir se muer en cultivateurs) ce sont les chaumes dorés, les troupeaux de bestiaux et les maisons de ferme avec leurs étables qu’ils désirent revoir.

Le train repart. Il roule sur une distance de huit milles à travers bois toujours. Mais voici que les bois s’éclaircissent, s’éclipsent peu à peu. Voici encore les clôtures en treillis longeant la voie ferrée, puis les champs de chaume enneigé avec leurs clôtures en fil de fer barbelé. Ce sont les terres qui avoisinent le hameau de Tisdale. Les bois sont passés : on entre dans une contrée de culture mixte. Là, ce n’est pas la prairie immense et nue ; ce sont des morceaux de prairie environnés de bosquets de trembles et de saules. Plus tard, dans dix ans, quinze ans ou vingt ans, la contrée sera-t-elle devenue tout à fait prairie ?

N’importe ! on va encore… On traverse Star City, Melfort et Birch Hill (contrée colonisée par les An-