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SOUVENIRS D’UN FANTÔME.

lui tous les délices de la fête ; et lorsqu’une heure du matin a sonné, il le souille du baiser fatal qui finit son supplice, et l’élégante princesse polonaise, si vive, si gracieuse pour tous les autres, se retire en promettant de revenir bientôt à Gênes ; elle ne reparut, car c’était la vision funeste. La nuit suivante, elle trouva un nouveau moyen pour s’introduire auprès de Grimani qui, en passant la nuit à travailler avec le doge, s’était imaginé que l’apparition n’oserait point franchir le palais de l’État : elle s’y présenta pareillement, et chaque fois que minuit sonnait, ce furent les mêmes scènes qui se renouvelèrent.

Le comte Grimani succombait insensiblement sous les coups du désespoir qui le dévorait ; la vie, la fortune, l’amour, tout était sans charmes pour lui ; il se voyait une existence affreuse que les fantômes tracasseraient toujours.