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SOUVENIRS D’UN FANTÔME.

homme du grand monde ; et je ne sais pourquoi je lui portais un intérêt réel. Je suis peu écrivain de mon naturel, et cela parce que j’ai trop vu. Deux ou trois jours s’écoulèrent, au bout desquels je m’avisai de demander au marquis de Champbonas quel était ce morose seigneur.

« Un homme malheureux, » me répondit-il, « un fat, sans doute, car il est poursuivi d’une vision bien ridicule. »

Le propre des hommes est de douter de ce qu’ils ne peuvent comprendre, et de ne croire que ce qu’ils savent voir. Je ne suis pas de ce temps-là, et avant d’accorder à cet étranger son brevet de monomanie, je voulais le questionner et causer avec lui. Je ne pus d’abord obtenir sa confiance ; il n’était pas de ceux qui jettent à la tête des premiers venus : aussi trouvait-on dans sa réserve un motif de se moquer de lui, Je mis de l’insis-