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SOUVENIRS D’UN FANTÔME.

grand branle, animé par une musique sans pareille : c’étaient douze cents squelettes, qui tordaient dans leurs mains des serpents gigantesques, à qui la souffrance arrachait d’épouvantables sifflements, quatre cents autres, étouffant dans leurs bras puissants des ours d’une taille démesurée, formaient la basse-taille de cette terrible harmonie. Dans une enceinte formée de bières, sur lesquelles retombaient en draperies les poêles funèbres et qu’illuminaient des phosphores diversement colorés ; là, dis-je, chaque mort, donnant et recevant la main de deux autres morts, se mit à danser le branle. Il fallait les voir s’agiter, aller, venir, tourner rapidement, se heurter, se choquer avec un cliquetis d’os qui faisait frémir jusqu’aux esprits célestes qui, dans ce moment, traversaient les airs. Oh ! quels transports ! quelle effrayante joie ! quel délire abominable ! que cette fête était