Page:Lamothe-Langon - Souvenirs d'un fantôme - Chroniques d'un cimetière, Tome I, 1838.djvu/350

Cette page a été validée par deux contributeurs.
344
souvenirs d’un fantôme

mille, mais je n’en avais pas besoin. Le coffre aux écus était dans cette chambre, je m’en emparai et sortis. La servante devait m’attendre hors du Mas ; je tournai vers elle. Déjà elle était là, bien enveloppée de sa cape ; je lui donnai la main, elle la prit et la serra dans la sienne avec une force dont je ne la croyais pas capable, et, se mettant à courir tandis qu’elle me tenait ainsi, m’entraîna, quoique je pusse faire, avec une vitesse qui m’enleva la respiration. Nous franchîmes les prairies, les champs, les bois, les coteaux, les ravins, et cela plus vite que ne s’élance le vent le plus impétueux. J’en étais confondu, hors de moi. Où allions-nous, avec qui étais-je ? et les ténèbres s’épaississaient, et il me semblait ouïr des voix criardes, des hurlements surhumains, un charivari infernal.

Tout à coup la terre, manqua sous mes