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mains qui se tendent !… Mais il faut les priver pour que la ration dure… Si vous saviez ! Si vous saviez ! »… Ses mains décharnées frémissaient, et sa voix semblait venir du fond de ses entrailles… La Louise sentit un grand déchirement se faire en elle. Elle se rappela qu’elle n’avait plus de grain à donner, qu’elle ne pouvait plus écouter son cœur… Comment refuser ? — « Que faire, mon Dieu, que faire ! » s’écria-t-elle. Mais, cette fois encore, la divine pitié l’emporta. Se dérobant comme une voleuse, elle courut au fournil, s’assura que son mari ne la vît pas, et, rapidement, avec des mains nerveuses et des yeux brillants, elle versa dans le sac du pauvre une mesure de blé…

Le lendemain, au petit jour, Pierre-Jean se disposa à semer. Il partit pour les champs. La Louise le suivait, et tremblait