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nous a donné plus, c’est pour ceux qui ont moins… » disait-elle, et, toujours, avec la même pensée et le même geste, lentement, gravement, statue vivante de la charité, elle versait dans le sac du pauvre une mesure de blé.

Chaque fois elle se disait : « C’est la dernière. » Mais le lendemain amenait un nouveau mendiant, plus misérable que tous les autres. Alors les larmes venaient aux yeux de la Louise. — « Seigneur, il y en a donc bien de ces miséreux ! » s’écriait-elle. Elle levait les bras au ciel, posait une main sur son cœur, et s’en allait vitement au fournil quérir une mesure de blé.

Un matin, Pierre-Jean lui dit : « Il reste du grain juste pour notre semence ; il ne faut pas y toucher, tu m’entends, femme ? La charité ne doit pas nous ôter le pain de la bouche… » Et la Louise promit. Le