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LÉGENDES GASPÉSIENNES.

le long des branches, et des moineaux sautillants jetaient dans l’air leur cri légèrement plaintif. J’avais un peu l’illusion d’être dans un vrai bois, dans une petite forêt lointaine où le pas des hommes n’a que rarement pénétré…

Mais cette illusion ne pouvait être de longue durée… Un sifflet d’automobile, une cloche de tramway, le lourd roulement d’un camion, tous ces bruits m’arrivaient par intervalles, dans un mélange brutal, au sein de ma charmante retraite. À travers le feuillage, je voyais passer, une à une, les nombreuses voitures qui circulaient de tous côtés. Au-dessus des plus hauts arbres se profilait, derrière la blanche statue de Dollard, le clocher de l’Immaculée-Conception. Ici et là, apparaissait la masse grise des maisons, couleur de fumée, derrière lesquelles on devine les rues affairées où circule sans cesse une foule agitée et fiévreuse. Le vent, qui relevait violemment la tête des arbustes, m’apportait mille bruits de la houleuse cité ; et j’entendais de loin la voix formidable d’un marchand de fruits et de légumes qui criait : « Oh !