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terrien, lié par des racines profondes au sol, aux arbres, aux moindres pierres de la maison qui l’avait vu naître, il ressentait une blessure plus cuisante que celle de l’ulcère dans son visage…

Mais, soudain, un éclair étrange passa dans ses yeux. Il se redressa, et traînant ses faibles pas jusqu’à la vieille commode de la chambre à coucher, il en sortit un porte-monnaie qu’il palpa entre ses doigts desséchés. Et le donnant au plus vieux de ses fils il lui dit : « Va tout de suite porter cet argent et régler notre dette. C’est tout ce que nous possédons. C’est ce qui devait servir à ma guérison… Mais j’aime mieux mourir que de laisser vendre mon bien. Va, mon fils, il vaut mieux que je parte et que la terre vous reste. Va chez le marchand payer la dette ; j’aime mieux mourir que de voir vendre ma terre et ma maison… Quand je serai disparu le Ciel vous viendra en aide… Va vite, mon enfant ; je mourrai content si je meurs dans ma maison ! »… Des sanglots montaient à sa gorge, des larmes, lentement, coulaient de ses yeux, et son noble visage, avec sa plaie vive et son expression résignée, avait quelque chose de divin…