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frère s’en empara par un soir de chasse, alors qu’il poursuivait avec acharnement une bande de ces canards sauvages qui s’envolent au moindre bruit. Ils allaient d’anse en anse et d’îlot en îlot. Quand les oiseaux fugitifs se rapprochaient de terre, le chasseur tenace sautait rapidement de sa chaloupe, et s’enfonçait dans ces hautes herbes qui masquent les bords des rivières. Là, avec un soin extrême, il se cachait au milieu des tiges et, mettant un genou en terre, il épaulait, prêt à tirer… Mais, hélas ! la déception ne tardait guère. Ouf ! Un bruit d’eau qu’on secoue, des battements d’ailes et les canards n’y étaient déjà plus. Chaque fois que leur caprice les dirigeait du côté de l’eau profonde, le jeune chasseur de nouveau montait dans sa chaloupe, et partait à leur recherche, avec l’aviron et le fusil.

Ce soir-là, il ne rapporta pas de canards, mais il arriva, heureux comme un conquérant, tenant précieusement entre ses bras cette belle outarde vivante qui se cachait la tête sous son aile. C’est dans une haute touffe de fenouils qu’il l’aperçut, se débattant, prise comme dans un filet. Elle semblait être blessée à une aile, et emprisonnée