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feuilles, étendues avec soin. L’ombre des arbres la recouvre constamment ; aucun filet de lumière ne pénètre jusque là. D’un automne à l’autre ce trou est plein de glace, et c’est là que nos provisions se gardent fraîches, même dans les jours de chaleur.

Nous sommes toujours en pleine forêt et Dieu sait combien elle est profonde !… La vie mystérieuse des arbres se déploie autour de nous, et se mêle à notre propre vie… Une multitude d’êtres y respirent, y palpitent, s’y meuvent dans l’ordre de la création, et cette vie sans cesse en mouvement nous retient par les fibres les plus profondes de l’âme. Qui croirait qu’une jeune fille peut aimer à vivre dans un pareil isolement ?… J’aime ces bois, ces montagnes pleines de mystères, cet infini de verdure qui s’étend comme un océan… J’aime notre pauvre toit, le jardin, le puits dont la margelle chante étrangement par les jours de grande brise… Son eau qui retombe en gouttelettes a des reflets argentés et chaque goutte reflète un coin du Ciel… Ainsi l’âme humaine qui est bonne, qui est sainte, reflète l’image de Dieu. Notre pensée peut contenir l’infini comme une goutte d’eau contient le firmament.