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GUSTAVE

une bataille près de l’île d’OEIand (26 juil.) et que la flottille cotière sous Gi-E. Ehrensvasrd se distinguait, tout en faisant de sérieuses pertes à Svensksund (24 août). L’année suivante fut plus favorable aux armes de la Suède : Gustave 111 vainquit à Valkiala (29 avr. 1790), dispersa une flottille russe devant Fredrikshamn (15 mai) et, après être sorti avec beaucoup de peine (3 juil.) du golfe de Viborg où ses deux flottes étaient bloquées, il remporta à Svensksund (9 et -10 juil.) une brillante victoire navale qui hâta la conclusion de la paix (Vœraelœ, 14 août), sur les bases du statu quo ante. Cette guerre, entreprise si légèrement, avait coûté à Gustave III 50,000 hommes et une trentaine de navires, mais c’était la première, depuis Charles XII, où la Suède eût fait respecter son drapeau et son indépendance.

Malgré le mauvais état des finances, un peu atténué par un subside annuel de 300,000 roubles que le tsar s’engagea à payer (19 oct. 1791), l’aventureux monarque songeait à se faire élire roi de Pologne et à faire une descente sur le littoral français delà Manche ; à cet eliet, il se rendit à Aix-la-Chapelle dans l’été de 1 791 pour se concerter avec les partisans de Louis XVI ; ces projets, d’une réalisation difficile, furent mis à néant par une nouvelle conjuration de quelques nobles : dans un bal masqué (16 mars 1792), l’un d’eux, Anckarstrœm, tira sur Gustave III qui ne fut pas tué sur le coup, mais il mourut des suites de sa blessure (29 mars) après avoir institué un conseil de régence présidé par son frère le duc Charles et avoir pris des mesures qui paralysèrent les desseins de l’aristocratie. Son règne avait été, malgré tant de fautes, l’un des plus brillants de l’histoire de Suède. Quant à sa personnalité, elle est très diversement jugée selon le point de vue auquel on se place ; mais on ne peut nier qu’il n’ait joué en grand acteur un rôle des plus dramatiques. De I Sophie-Madeleine (1746-1813), tille de Frédéric V, roi de Danemark, qu’il avait épousée le 1 er oct. 1766, il eut deux fils : Gustave IV qui lui succéda, et Charles-Gustave, duc de Smâland (1782-3).

Quoiqu’il se fût constamment appuyé sur les plébéiens, ses goûts étaient très raffinés ; il aimait la pompe, les arts, les lettres ; il ne se borna pas à fonder quatre académies (de musique, 1771 ; de peinture et sculpture, 1773 ; suédoise, 1786 ; des belles-lettres, d’histoire et d’archéologie, 1786), le théâtre suédois (1773, appelé grand théâtre depuis 1782) ; à encourager les beaux esprits de toute sorte et d’en appeler même de l’étranger ; à acquérir beaucoup d’antiques de haute valeur ; il cultivait lui-même la gravure à Vaqua-tinta et à l’eau-forte, l’architecture ; il était l’un des premiers orateurs politiques et académiques dans une période qui en produisit en grand nombre ; il donna le plan de Gustave Vasa, opéra national, mis en vers par J.-H. Kellgren et en musique par Naumann (représenté en 1786) ; il composa en prose : Gustave-Adolphe et Ebba Brahe, mis en vers par Kellgren et en musique par l’abbé Vogler (1788) ; Siri Brahe et Johan Gyllenstierna (1788), trois pièces qui sont restées au répertoire jusqu’à nos jours ; déplus il en adapta et localisa beaucoup d’autres. Ses Ecrits ’politiques, littéraires et dramatiques suivis de sa correspondance (traduite en français par Dechaux, Stockholm, 1803-5, 5 vol. in-8), ont été publiés en suédois parJ.-G. Oxenstierna (id. 1806-13,5 vol. ; nouv. édit., 1835, 3 vol.) ; les pièces de théâtre reimprimées en deux volumes (1826 et 1857). Des extraits et analyses des Papiers de Gustave III ont été donnés par E.-G. Geijer (Upsala, 1843-45, 3 vol. ;2" édit., 1876). Sa statue par Sergel a été érigée à Stockholm en 1808. Bkauvois. Bibl. : Correspondance antre le prince Gustave de Suède et le comte de Scheffer, 1772, in-8. — Hemliga Handlingar hœrande tilt Sveriges liistoria efter K. Gustaf IIIs antrœde till regeringen, édit. par P.-A. Vallmark et J.-E. Schartau ; Stockholm, 1821-25, 3 vol. — Recueil de documents inédits concernant l’histoire de Suèdesous le règne tle Gustave III, publ. par L. Manderstrœm ; id., 1817-49, 2 vol. — Gustaf IIIs bref till C.-A. Wachtmeister och Franc, édit. par G. Andersson ; GErebro, 1800. — K. Gustaf IIIs bref till G.-M, Armfelt, édit, par E. Tegner : Stockholm, 1883.— Mémoires de l’.-A. et II. -A. von Kersen, L. et J. von EngestrcEm, G.-J. ËHrensv^erd, O. Wai.l-QvisT, J.-Chr. G. Barfod, Charles prince deHesse,etréimpression de ceux d’E. Schrœderheim, G.-G. Adlebbbth et li.-M. Armfelt, faite par les soin» d’E. Tegner sous le titre de Frhn tredje Gustafs dagar ;id-, 1892 et suiv. — Kr. Beccatini, Storia delregno e délia vita diGustavolII ; Venise, 1792, 4 vol. in-8. — K.-L. Posselt, Geschichte Gustav’s III : Karlsruhe. 1792, in-8 ; trad. en franc, par J.-L. Manget ; Paris, 1807, in-8. — A.-Fr. Geisler, Leoen des Kœnigs von Schweden Gustav’s III ; Leipzig, 1798) 2 vol. in-8. — A.-H.-D. von Bulow, Gescliichte Gustav’s III ; id., 1800-10, 3 vol. in-8. — C.-J.-E. dAguila, Histoire du règne de Gustave III ; Paris, 1807, 3 vol. in-8 ; id-, 1815, 2 voi. — G. von Schantz, liistoria œfver hriget emellan Sverige och Ryssland, 1188-90, 1817-18, 2 vol. — C.-M, Creutz (Malmanen), Anjala fœrbundet ; Helsingfors, 1818. — Bergman von Schinkel, Minnen ur Sveriges nyare historia ; 1855-6, t. I-1V,2» édit.— L. Manderstrœm, Om Gustaf IIIs ytlre politik, 1791-92, 1859. — G. Lagus, Guslaj III och hans lidehvarf uppfattade af poesien ; Helsingl’ors, 1860. — B. von Bkskow, Om Gustaf III sasom konung och menniska ; Stockholm, 1860- 67, 4 vol. — J.-A.-C. Hallstenius, Fœrsoik till framstœltning af K. Gustaf IIIs danshe polilih ; Upsala, 1862 — V. Tham, K. Gustaf III och rikels stsender, 1189 ; Stockholm, 1866. 2 fasc. — A. Geffroy, Gustave III et la cour de France ; Paris, 1867, 2 vol. in 12. — E.-W. Montan, Bidrag till Gustaf IIIs historia ; Stockholm, 1869. — J. Mankell, Anteckningar rœrande finsha arméens och Finlands krigs-historia ; id., 1870, 2 vol. — N. Tengberg, K. Gustaf IIIs fœrsta regeringstid ; Lund, 1871. — O. Nii.sson, Blad ur K. Gustaf IIIs historia ; Malrnœ. 1873, in-4.

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GUSTAVE IV Adolphe, né à Stockholm le 1 er nov. 1778, mort à Saint-Galles le 7 févr. 1837, régna de 1792 à 180 !). Fils aîné du précédent et de la reine Sophie-Madeleine, il fut soigneusement élevé par N. von Ilosenstein et J.-G. Flodin, qui lui inculquèrent le goût de l’ordre et de l’économie, la piété et la fermeté de caractère ; mais, par suite de l’étroilesse de son esprit ces qualités dégénérèrent en parcimonie, en mysticisme et en opiniâtreté ; la fin tragique de son père l’avait d’ailleurs rendu sombre et méfiant. Monté sur le trône le 29 mars 1792, il fut jusqu’au 1 er nov. 1796 sous la tutelle d’un conseil de régence présidé par son oncle le duc Charles de Sœdermanland. A sa majorité, il voulut gouverner par lui-même et réussit à mettre les finances en bon état, jusqu’à ce que la disette de 1798-99 fit tomber les billets de banque à la moitié de leur valeur nominale. Il dut convoquer la Diète àNorrkœping (1800) et lui arracha son consentement à des projets irréalisables ; aussi fallut-il faire un emprunt au duc de Mecklembourg-Schwerin, en lui donnant en gage la ville de Wismar (1803).

D’abord opposé à l’Angleterre, contre laquelle il conclut avec la Russie, le Danemark et la Prusse un traité de neutralité armée (1800), il dut se rapprocher d’elle (1801), comme ses alliés avaient été forcés de le faire. Pendant un long séjour dans la principauté de Bade (1803-5), excité par les émigrés français et exaspéré de l’assassinat du duc d’Enghien, il conclut avec l’Angleterre (3 déc. 180Ï) et avec la Russie (14 janv. 1805) un traité d’alliance contre Napoléon en qui il voyait la bête de l’Apocalypse. Il rompit toute relation avec la France, prohiba même les livres et les journaux français, et passa avec une armée dans la Poméranie suédoise ; mais il se montra aussi incapable comme général que comme politique et refusa de conclure la paix lorsque la Prusse et la Russie eurent été vaincues. En 1807, la Poméranie fut occupée par les Français qui, de concert avec les Danois, menaçaient le S.-O. de la Suède.