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GRILLON

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sablonneux, sur les coteaux exposés au soleil. Il creuse en terre des galeries dont la profondeur varie de 10 à 25 centim. et dans lesquelles il se réfugie à la moindre apparence de danger. Pour l’en faire sortir, il sullit d’introduire jusqu’au fond du trou un brin de paille à l’extrémité duquel on a attaché préalablement un petit insecte. Le Grillon saisit avec fureur le brin de paille et se laisse traîner au dehors plutôt que de lâcher prise. Ouand le mâle produit la stridulation aiguë et monotone que l’on connaît et qui constitue son chant d’appel pour la femelle, il se tient les pattes écartées, appuie son thorax contre le sol, soulève légèrement ses élytres et les frotte rapidement l’une contre l’autre. Le son produit est d’autant plus vif et plus fort que le mouvement est plus rapide et la pression plus considérable. En examinant les élytres avec soin, on voit que chacune d’elles offre un champ discoïdal formé d’une membrane sèche, mince, translucide, qui rend un son net quand on la froisse, et composé de deux plans comprenant entre eux un angle droit, dont l’arête est renforcée par quatre nervures droites, longitudinales et parallèles. L’un de ces plans recouvre le dos de l’insecte et est divisé lui-même en un grand nombre d’aréoles par d’autres nervures régulièrement contournées, formant deux systèmes principaux entre lesquels se trouve un espace à peu près triangulaire, plus ferme et plus transparent que le reste de î’élytre et qui constitue la chanterelle. Le premier système est composé de quatre nervures ou cordes s’appuyant sur une grosse nervure (nervure phonogène ou archet), qui fait saillie principalement à la face inférieure de I’élytre et est striée transversalement comme une lime. Ouant au second système, il est formé de trois nervures prenant leur origine à une sorte de brosse ou faisceau de poils courts et raides, située au bord interne, au-dessous de la base de la nervure phonogène. Maintenant, si l’on se représente les deux élytres croisées l’une sur l’autre et frottant l’une contre l’autre, on comprend facilement que l’archet de I’élytre supérieure, en passant sur la chanterelle de I’élytre inférieure, y excite des vibrations qui se communiquent à toute I’élytre. De plus, la n»rvure phonogène vibre elle-même comme I’élytre à ..quelle elle est attachée, de sorte que la stridulation est xe résultat de la vibration simultanée des deux élytres (V. Goureau, Ann. Soc. ent. de France, 1837, p. 31).

Le Grillon domestique ou Grillon des foyers, Grillon des boulangers, Cri-Cri (Gryllus domeslicus L.) est plus petit que le Grillon des champs. Sa couleur est d’un jaune testacé pâle avec des taches brunes sur la tête et le prothorax. Les élytres, d’un jaune brunâtre, sont plus courtes que l’abdomen dans les deux sexes. On le rencontre dans toute l’Europe, sauf en Laponie. On ne connaît pas sa patrie primitive, car on ne l’a encore trouvé vivant en liberté dans aucun pays. Il habite exclusivement les maisons, ou il recherche les endroits les plus chauds, tels que les fentes des murs des boulangeries et des cuisines, derrière les cheminées dans les campagnes, les brasseries, les casernes, les hôpitaux, etc. A ce titre, il rappelle les Blattes des cuisines avec lesquelles on le trouve fréquemment. Il se reproduit toute l’année et se multiplie considérablement. La stridulation est produite parles mâles de la même manière que chez le Grillon des champs ; seulement le son est à la fois plus faible et plus élevé en raison de la taille moindre de l’insecte et du rapprochement plus étroit des stries de la nervure phonogène.

Quant au Grillon des bois (Gryllus silvestris Fabr.), il constitue le type du sous-genre Nemobius Audin.-Serv. II est long de 8 à 9 milliin., de couleur brune, avec la tête, les côtés des élytres et de l’abdomen noirs. On le rencontre communément dans les bois de l’Europe moyenne, principalement dans les lieux ombragés, parmi les feuilles mortes. Au contraire du Grillon des champs, il vit à l’air libre et se sauve en faisant des sauts ou des bonds rapides. La stridulation des mâles est forte et s’entend d’assez loin. Ed. Lef. II. Paléontologie. — On a signalé, dans le lias d’Allemagne, une espèce (Gryllus Dohbert inensis Geinitz) qui reste douteuse, mais dans le tertiaire on en a trouvé plusieurs appartenant aux genres Gryllus, Gryllotalpa, Xy à-, Œcanthus et Nemobius. La plupart sont du gypse d’Aix. On en connaît aussi des couches de Green River du Wyoming dans l’Amérique du Nord. E. Trt.

GRILLON-Taupe (Gryllotalpa Latr.). Genre d’Orthoptères sauteurs, de la tribu des Gryllides, dont l’espèce type, Gryllotalpa vulgaris Latr. (Gryllus Gryllotalpa L.), est appelée vulgairement Grillon-Taupe, Taupe-Grillon, Courtilière (du vieux mot français courtil ou courtille, qui signifie jardin), ou bien encore Ecrevisse de terre, à raison de la forme et des grandes dimensions de son prothorax. C’est un insecte long de 4 à a centim., au corps bleuâtre, revêtu d’un feutrage épais, mais très court, d’une couleur brun de rouille, à reflets veloutés. La tête, un peu conique et inclinée, porte deux petits yeux noirs, deux ocelles sur le front et deux longues antennes sétacées, multiarticulées. Les palpes maxillaires, formés de cinq articles, font saillie en avant en dehors des antennes. Le prothorax, très grand, ovoïde, embrasse les côtés du corps et ressemble grossièrement à une carapace d’Ecrevisse. Les élytres sont plus courtes que l’abdomen dans les deux Gryllotalpa vulgaris Latr.

sexes. Les ailes, très développées, se replient, au repos, en lanières qui dépassent longuement l’abdomen. Les pattes, courtes, comprimées et robustes, sont terminées par des tarses de trois articles qui se replient dans un canal du bord externe des tibias. Les antérieures présentent une conformation très remarquable ; leurs hanches sont énormes, leurs cuisses ovales et aplaties, leurs tibias courts, extrêmement élargis, palmés et fortement dentés, enfin chacun des articles des tarses est dilaté latéralement en une dent semblable à celle des tibias, mais plus petite. Chez la femelle, l’abdomen est dépourvu de filets terminaux et d’oviscapte saillant.

Le Grillon-Taupe se rencontre partout en Europe, excepté en Laponie et dans les contrées les plus boréales. On le trouve également en Algérie, en Asie Mineure et au delà du Caucase. 11 habite de préférence les sols meubles légers ou sablonneux : aussi le trouve-t-on principalement dans les jardins, les potagers, les pépinières, les champs de blé, les couches appropriées à la culture des primeurs, etc. Il vit presque exclusivement cache dans des galeries souterraines qu’il creuse dans toutes les directions avec ses pattes antérieures, en comprimant la terre contre les parois et amoncelant à l’entrée principale un monticule de déblais analogue à celui de la Taupe, mais bien plus petit. Aux mois de juin et juillet, les mâles produisent, soit sous terre, soit à l’entrée de leurs galeries, une stridulation crépitante assez faible, quine s’entend qu’à petite distance. Ils volent le soir en rasant la terre par mouvements onduleux et s’accouplent pendant la nuit. Mais le mode d’accouplement n’a pas encore été observé. Les femelles fécondées creusent en terre des nids voûtés, dont la forme et les dimensions sont à peu près celles d’un œuf de poule et auxquels aboutissent plusieurs galeries contournées. Elles v pondent chacune de deux à quatre cents œufs arrondis, jaunâtres, brillants, d’où sortent au bout de trois à quatre semaines de petites larves blanches de la grosseur d’une fourmi. Ouand elles ont subi leur première mue, ces larves se dispersent ; elles ne deviennent Insectes parfaits qu’au mois de juin de l’année suivante.