Page:Lamirault - La Grande encyclopédie, inventaire raisonné des sciences, des lettres et des arts, tome 16.djvu/259

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pouvons comparer Eschyle à Sophocle et Euripide dont nous possédons des tragédies sur le même sujet. On raconte que l’apparition sur la scène des Érinnyes avec leurs torches et leur chevelure de serpents provoqua une telle terreur chez les spectateurs que des femmes avortèrent et des enfants moururent de peur.

Il nous reste à apprécier l’importance littéraire d’Eschyle ; pour sa place dans la littérature grecque et son rôle dans l’évolution théâtrale, nous renvoyons à l’art. Tragédie ou la tragédie eschylienne, ses chœurs, ses acteurs, les mètres poétiques qu’elle emploie, son caractère moral, etc., seront étudiés et comparés à ceux des autres tragiques grecs et aux œuvres postérieures (V. aussi l’art. Grèce [Littérature]). Le génie d’Eschyle a été méconnu par les critiques de l’époque classique, en particulier du XVIIIe siècle français ; en revanche, il a été porté aux nues par les romantiques très épris de sa philosophie fataliste. Il est certain qu’il est presque unique dans l’histoire littéraire par son âpre grandeur ; Dante seul peut lui être comparé. La composition est toujours simple, l’action rectiligne pour ainsi dire ; les caractères sont dessinés avec une puissance incomparable et surhumaine ; le groupement et l’opposition, le conflit entre plusieurs caractères lui demeure étranger ; il met un homme aux prises avec une situation, conservant dans le développement de sa pièce l’antithèse entre l’élément épique et l’élément lyrique qu’il juxtapose. C’est dans les chants du chœur qu’il met sa philosophie souvent si profonde. Ces chants conservent une symétrie rigoureuse dans la forme métrique. La langue d’Eschyle est archaïque ; il l’emprunte à Homère et s’en rapproche plus que de Sophocle qui fut son contemporain. Au point de vue de la versification variée et impeccable, Eschyle n’a été atteint que par Aristophane ; mais ce qui fit son succès et lui attire encore des fanatiques, c’est la simple et hautaine grandeur de ses conceptions, l’indomptable énergie de ses héros aux prises avec la fatalité.

L’édition princeps d’Eschyle parut à Venise chez les Aide en 1518 (in-8) ; elle reproduit le Medicens et réunit Agamemnon et les Choéphores en une pièce, n’ayant pas constaté l’importance de la lacune de ce manuscrit. Cet erreur fut réparée dans l’édition publiée chez Henri Estienne à Paris (1557, in-4), par Vettori. On peut citer ensuite les éditions de Canter (Anvers, 1580, in-12), Stanley (Londres, 1663, in-fol.) avec traductions et commentaires qui sont reproduits dans celle de Cornelius de Paw (La Haye, 1745, 2 vol. in-4). Viennent ensuite celles de Porson (Londres, 1806), Schütz (Halle, 1782 et suiv. ; 3e éd., 1809-1822, 5 vol.), Wellauer (Leipzig, 1825), G. Hermann (Berlin, 1859, 2e éd.), celle de Dindorf souvent reproduite (Oxford, 1834 ; en dernier lieu 1865 et 1869), Boissonnade (collection Didot, Paris, 1825, 2 vol.), de Weil (Giessen, 1858-1867 ; Leipzig, 1884), Meckel (Oxford, 1871), Kirchhoff (Berlin, 1880), Wecklein (Berlin, 1884). Il y a en outre d’excellentes éditions partielles des Perses par Blomfield (Leipzig, 1823), Meckel (Leipzig, 1869), Schiller (Berlin, 1869), Teufel (Leipzig, 1875, 2e éd.) ; des Suppliantes par Schwerdt (Berlin, 1858), Oberdick (Berlin, 1869) ; des Sept contre Thèbes par Blomfield (Leipzig, 1823) et Ritschl (Leipzig, 1875, 2e éd.) ; du Prométhée enchaîné par Blomfield (Leipzig, 1822), Schœmann (Greifswald, 1844 avec trad.) et Wecklein (Leipzig, 1872, 2e éd.) ; d’Agamemnon par Blomfield (Leipzig, 1823), Klausen (Leipzig, 1863, 2e éd. par Enger), Schneidewin (Berlin, 1856), Nægelsbach (Erlangen, 1863), Keck (Leipzig, 1865, avec trad.), Enger (Leipzig, 1874, 2e éd. par Gilbert) ; des Choéphores par Blomfield (Leipzig, 1824), Klausen (Leipzig, 1835), Bamberger (Gœttingue, 1840), de Jongh (Utrecht, 1856) ; des Euménides par Ot. Muller (Gœttingue, 1833, avec trad.), Meckel (Gotha, 1857). On peut citer encore les traductions allemandes de Voss (Heidelberg, 1827), Droysen (Berlin, 1884, 4e éd.) et Bruch (Breslau, 1881) ; les traductions françaises de La Porte du Theil (Paris, 1794), Pierron (Paris, 1845, 2e éd.).

Bibl. : Outre les éditions auxquelles sont joints de savants commentaires et les ouvrages généraux sur la littérature grecque (V. Grèce), nous citerons : Wellauer, Lexicon Æschyleum ; Leipzig, 1830-1831, 2 vol. — Dindorf, Lexicon Æschyleum ; Leipzig, 1876. — Welcker, Die Æschylische Trilogie ; Darmstadt, 1824 ; suppl. Francfort-surle-Main, 1826. — H. Weil, Aperçu sur Eschyle et les origines de la tragédie grecque ; Besançon, 1819. — Jules Girard, le Sentiment religieux en Grèce, d’Homère à Eschyle ; Paris, 1869, in-8. — Courdaveaux, Eschyle, études littéraires ; Paris, 1871.

ESCLAGNES. Com. du dép. de l’Ariège, arr. de Pamiers, cant. de Mirepoix ; 176 hab.

ESCLAIBES (Louis-Charles-Joseph), comte de Clairmont-d’Arronville, homme politique français, né à Saint-Dizier le 17 nov. 1746, mort à Saint-Dizier en 1818. Officier au régiment de Royale-Infanterie, il fut député de la noblesse du bailliage de Chaumont en Bassigny aux États généraux, le 28 mars 1789. Il se montra constamment partisan de l’ancien régime. Il fut un des rédacteurs des Actes des apôtres, et publia en 1790 une brochure contre Marat. En 1791, il émigra et servit dans l’armée de Condé.

ESCLAINVILLERS. Com. du dép. de la Somme, arr. de Montdidier, cant. d’Ailly-sur-Noye ; 219 hab.

ESCLANÈDES. Com. du dép. de la Lozère, arr. de Marvejols, cant. de Chanac ; 459 hab.

ESCLANGON. Com. du dép. des Basses-Alpes, arr. de Digne, cant. de La Javie ; 56 hab.

ESCLAPÉS de Guillo (Pascual), libraire et écrivain espagnol du XVIIIe siècle, né à Elche, mort à Valence le 24 mars 1755. Il a beaucoup écrit ; outre de nombreuses pièces de vers pour les fêtes religieuses, il composa quatre comédies : El Martirio más sangriento y muerte en cama de flores et El Premio de la humiltad, qui sont deux autos, le premier en l’honneur de saint Vincent, le second de saint Louis Beltram et qui furent représentées à Valence ; la Restauración de Orán et Amor imposibles vence y piadoso Bandolero. On lui doit de plus un livre d’histoire : Resúmen historial de la fundación y antigüedad de la ciudad de Valéncia (Valence, 1738, in-4 ; réimpr. avec additions de Antonio Suarez, Valence, 1805 ; in-4).

E. Cat.

ESCLASSAN-la-Blastide. Com. du dép. du Gers, arr. de Mirande, cant. de Masseube ; 436 hab.

ESCLAUZELS. Com. du dép. du Lot, arr. de Cahors, cant. de Saint-Géry ; 422 hab.

ESCLAVAGE. Sociologie. — L’esclavage est la condition de l’homme qui est la propriété d’un autre homme. Il implique non pas seulement une restriction de la liberté personnelle, comme il arrive dans notre société au mineur, à la femme mariée, à l’interdit ou dans d’autres sociétés soumises au régime des castes à la pluralité des habitants ; l’esclavage implique une suppression totale de cette liberté ; l’esclave est une chose, la chose de son maître ; on le range au nombre des instruments, avec les animaux domestiques, auxquels on peut l’assimiler. L’esclavage est une institution à peu près universelle qu’on retrouve chez les peuples les plus divers et chez les races les plus éloignées les unes des autres. Cependant, il ne se constate pas à tous les degrés de l’évolution sociale. Dans les sociétés sauvages, qui vivent principalement de la chasse, il n’existe guère ; l’ennemi vaincu est mis à mort ; tout au plus emmène-t-on des femmes pour les ajouter à celles de la tribu sur lesquelles les mâles se déchargent de tous les travaux domestiques. À l’état pastoral, on ne fait guère d’esclaves que pour les revendre ; le soin des troupeaux se confond presque avec les travaux domestiques, et les membres de la tribu y suffisent sans peine. C’est chez les peuples parvenus à l’état sédentaire et à la civilisation agricole que l’esclavage se développe. L’économiste Dunoyer a observé avec beaucoup de sagacité, et conformément aux idées d’Auguste Comte, que le régime économique de toutes les sociétés qui viennent de se fixer, de passer à l’état sédentaire,