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dans un âge avancé. Il fut enterré dans l’église Saint-Germain-l’Auxerrois, où sa tombe a été retrouvée et restaurée en 1843. Chancy, qui publiait en 1629 sa Tablature de mandore, a inséré dans cet ouvrage un gracieux branle de Bocan, seul échantillon qui nous soit resté de la musique de cet artiste. A. P.

BOCANE. C’était une danse figurée d’un caractère assez grave, qui devait son nom à son inventeur, le fameux maître à danser Bocan, et qui jouit d’une véritable vogue pendant tout le xviie siècle. Toutefois, elle n’était déjà plus en usage au milieu du siècle suivant, et Rameau le constate dans son livre sur la danse.

BOCANEGRA (Pedro-Atanasio), peintre espagnol, né à Grenade en 1635, mort en 1688 ; élève d’Alonso Cano. Après Juan de Sevilla, le premier et le plus original des peintres qui se formèrent aux leçons des deux maîtres, Alonso Cano et Pedro de Moya, établis vers la seconde moitié du xviie siècle, Bocanegra se recommande par des qualités de style et de coloris qui le placent au rang des meilleurs artistes de l’Andalousie. Cano en avait fait un grand dessinateur et Moya lui apprit ce coloris qu’il avait lui-même acquis des Flamands. Bocanegra a peint dans sa ville natale nombre d’ouvrages remarquables ou le sentiment espagnol se pare assez souvent du merveilleux éclat des teintes de Van Dick. Ses plus importantes compositions se trouvent à la cathédrale. C’est d’abord un sujet mystique placé sur un autel : saint Bernard, agenouillé, prie la Vierge assise sur les nuées, tandis qu’au premier plan, un pieux archevêque de Grenade, fray Francisco Rois y Mendoza, est prosterné en adoration ; un Christ à la colonne, flagellé par ses bourreaux, décore un autre autel ; puis c’est la Vierge portant l’Enfant et apparaissant à saint Jean de Matha, la Vision de saint Pierre Nolasque, un Christ en croix, et enfin, dans la grande chapelle, les Docteurs des églises grecque et latine. Tous les ouvrages que nous venons de citer accusent chez l’artiste un talent d’une grande souplesse, élégant, un peu facile, mais qui s’élève pourtant quelquefois jusqu’à la puissance et reste toujours séduisant. Irritable à l’excès, gâté par les louanges de ses amis et très vain de son mérite, Bocanegra est célèbre dans l’histoire anecdotique de l’école espagnole par ses vantardises et ses défis portés à des rivaux en art, défis qui ne se terminaient pas toujours à sa plus grande gloire. Pendant un séjour qu’il fit à Madrid, son orgueilleuse jactance lui attira avec le peintre Matias de Torres, de méchants démêlés. Provoqué publiquement par celui-ci à donner des preuves de son talent en exécutant dans un temps déterminé un sujet qui lui serait indiqué, curieux genre de défi que les artistes espagnols pratiquaient assez fréquemment entre eux, Bocanegra se retrancha dans sa dignité pour refuser le cartel ; en butte à cette occasion aux railleries de ses confrères, il se vit obligé, malgré la protection du marquis de Mancera, de quitter Madrid et de retourner à Grenade. Une nouvelle mésaventure l’y attendait. Teodoro Ardemans, élève de Claudio Coëllo, sollicitait alors du chapitre de la cathédrale la place de maestro mayor des travaux. Quelques peintures qu’il venait de terminer donnèrent lieu à des comparaisons entre lui et Bocanegra qui blessèrent au vif l’amour-propre de celui-ci. Pensant se débarrasser de son rival par l’intimidation, il lui fit proposer de peindre, devant des connaisseurs et à tour de rôle, leurs portraits réciproques. Ardemans accepta. Au jour dit, en une séance, il ébauchait un superbe portrait, très ressemblant et de la plus vaillante exécution. Le lendemain, c’était le tour de Bocanegra de prendre la palette. Mais, sous un prétexte quelconque, il manqua au rendez-vous ; il fit remettre la séance, chercha par tous les moyens à gagner du temps et, finalement, s’abstint. Cette défaite le couvrit de ridicule et ses biographes affirment que le dépit et le chagrin qu’il en ressentit ne furent pas étrangers à sa mort. Indépendamment des peintures qui se trouvent à la cathédrale, Bocanegra a produit nombre d’autres ouvrages pour les églises de Séville, de Jaen, de Badajoz et pour les couvents de chartreux de Grenade, du Paular et de Miraflores. Il y avait de lui, dans l’ancienne galerie espagnole du musée du Louvre, un Jugement dernier, et une de ses compositions religieuses figurait au catalogue de la collection Aguado : ces deux peintures donnaient bien la note du talent gracieux mais fait surtout d’adresse et de pratique de Bocanegra. Une Madeleine se dépouillant de ses parures, fait partie de la galerie du palais de San-Telmo, à Séville.

P. Lefort.

Bibl. : Palomino, Vidas de los pintores eminentes españoles ; Madrid, 1724. — Cean Bermudez, Diccionario de los mas ilustres profesores ; Madrid, 1800. — Ponz, Viage de España ; Madrid, 1787.

BOCARD. Les bocards ont été autrefois d’un usage très répandu et sont encore employés dans des cas spéciaux pour le broyage des minerais. Une batterie de bocnrd se compose essentiellement ; 1° d’un bâti destiné à guider le mouvement des (lèches, à assurer la transmission de la force qui les fait mouvoir, et à supporter le contre-coup des efforts exercés par leur chute ; 2° de flèches ou pilons en nombre variable, tour à tour soulevées et abandonnés à l’aide de cames convenablement disposées sur un arbre général tournant et dont la chute produit l’écrasement du minerai à broyer ; 3° des auges, compartiments fermés en partie, dont la fonction est de recevoir et de retenir les matières jusqu’à ce qu’elles aient atteint le degré de division cherché.

Les dispositions de détail ont subi suivant la qualité du minerai, le degré de finesse que l’on veut atteindre et surtout suivant les contrées, une infinité de modifications. Le bâti d’un bocard se composait autrefois (tig.l) de forts madriers de bois consolidés par des étais latéraux et reliés entre eux par des solives dont chacune est à son tour reliée à celle qui lui fait face par des chevilles en bois déterminant ainsi à trois ou quatre pieds au-dessus de l’auge, puis à la partie supérieure, des prisons pour guider le mouvement des pilons. Les pilons se composaient d’une flèche en bois de sapin, de hêtre ou de chêne, munie à sa partie inférieure d’un sabot en fonte dure, généralement moulée en coquille ; l’équarrissage du sabot et de la flèche étaient à peu près les mêmes, de 14 à 20 centim., et le sabot était fixé à la flèche par une queue serrée à

l’aide de coins et frettée. L’intensité du choc est en raison de la force vive de chute, c.-à-d. du poids de la flèche et de sa levée. Le résultat effectif ne s’apprécie cependant pas uniquement par le produit de ces deux facteurs ; un pilon léger, tombant de plus haut, donne un coup plus sec qui brise et éclate le morceau en produisant moins de fine ; au contraire, un pilon lourd soulevé moins haut broie et pulvérise davantage ; on arrive dans cette voie au bocardage à mort. La hauteur du sabot, variable avec l’usure, était de 20 à 30 centim. Sauf le sabot, les pièces principales étaient autrefois en bois. La construction s’est métallisée peu à peu ; on a fait la plaque de fondation en fonte reposant sur de la maçonnerie ou sur du béton ; sur cette