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Petit-Jury pour assurer l’impunité à ceux d’entre eux qui s’étaient rendus coupables de délits politiques. Le procès des meurtriers de Chartrand n’est pas le seul cas où l’on croit généralement que cela ait été fait. L’on prétend que les meurtriers d’un soldat du 24e régiment, nommé Hands furent également sauvés par la partialité du Jury. Un membre respectable et intelligent du Grand-Jury qui siégea à Montréal en Octobre 1837, informa le Gouvernement que rien ne pouvait être plus convenable que la conduite de la plus grande partie des Jurés-Canadiens dans les affaires étrangères à la politique ; ils étaient attentifs à suivre patiemment les témoignages, et à adopter l’opinion du président qui était un magistrat d’une haute qualification ; mais quand il était question d’affaires politiques, ils ne gardaient plus même les apparences de l’impartialité, et ils rejetaient les indictments par acclamation, sans écouter les remontrances du Président.

Ainsi le procès par Jury dans le Bas-Canada a non seulement détruit la confiance dans l’administration impartiale des lois, mais aussi assuré l’impunité à toute personne coupable de délit politique.

Je ne puis terminer ce rapport sur le système de la justice criminelle, sans faire quelques remarques sur le corps qui l’administre dans ses premiers degrés et dans ses plus minutieux détails, à la grande masse du peuple de la province ; je veux parler de la magistrature ; — et je ne puis que regretter que parmi les institutions qu’on a empruntées dans le Bas-Canada du système Anglais pour l’administration de la justice, soit celle d’avoir des Magistrats non-payés. Je ne prétends pas ravaler le caractère et les services de ce corps, l’un des plus respectables du pays. Mais le plus chaud admirateur de cette institution doit admettre que les avantages qui en résultent proviennent principalement du caractère particulier de la classe dont notre magistrature est composée ; et que sans l’éducation générale, la responsabilité morale qui lui est imposée par sa haute situation, le contrôle exercé par les personnes de la même classe et le tribunal d’un public éclairé et vigilant, et sans les habitudes des affaires, que possède jusqu’à un certain point tout sujet Anglais, les gentilshommes Anglais des campagnes même ne pourraient exercer leurs pouvoirs irresponsables de Magistrats à la satisfaction de leurs concitoyens. Quelle doit être alors l’opération de cette institution dans une Colonie, privée de ces contrôles, et composée d’hommes que leur situation et leur éducation feraient presque tous exclure de la magistrature en Angleterre ? Quand nous transplantons nos institutions Anglaises dans nos Colonies, nous devrions au moins examiner d’avance si l’état social de la Colonie