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Conseil Législatif et aux Gouverneurs que l’alternative de rejeter ceux qui avaient été trouvés avantageux, ou de passer ceux qui à leur avis avaient été désavantageux. Il en arriva un singulier exemple en 1836, à l’égard du renouvellement de la loi du Jury, à laquelle l’Assemblée attachait une grande importance, et pour laquelle le Conseil Législatif sentait une forte répugnance, à raison de ce qu’elle avait de fait placé les Jurys entièrement entre les mains de la portion française de la population. Pour assurer le renouvellement de cette loi, l’Assemblée le mit dans le même Bill par lequel elle renouvelait les péages du canal de Lachine, calculant que le Conseil n’oserait pas faire avorter une mesure d’une aussi grande importance pour le revenu que la dernière, en rejetant la première. Le Conseil cependant rejeta le Bill ; et ainsi le canal demeura libre de péages pendant toute une saison, parceque les deux Chambres différaient d’avis sur une loi de Jury.

Encore cette coutume de tacking ne se borna-t-elle pas au cas de renouvellement de lois expirantes. Un bill pour l’indépendance des Juges fut joint avec l’établissement d’un nouveau tribunal pour juger des accusations parlementaires, et avec d’autres dispositions auxquelles on savait que la couronne était décidément opposée, et c’est ainsi que fut sacrifiée une garantie désirable pour l’administration pure de la justice, dans la tentative d’extorquer une concession sujette à objection.

Le système ainsi formé, fut complété par les réglements au sujet du quorum, et l’usage qu’en fit la majorité. Un quorum de près de la moitié de toute la chambre fut requis pour la transaction des affaires. Vers la fin de chaque session récente, la majorité avait coutume de faire manquer le quorum, et de se disperser chacun chez soi, sans attendre la prorogation, immédiatement après avoir envoyé un nombre de bills au conseil, ne laissant ainsi aucun moyen de considérer ou d’adopter les amendements que ce corps pouvait faire, et ne laissant aucune alternative entre le rejet ou la confirmation en gros des mesures de l’assemblée.

Mais en décrivant les moyens par lesquels l’assemblée obtint et essaya de consolider son pouvoir, je ne dois pas omettre de diriger une attention particulière sur celui qui, après tout, fut le plus efficace, et qui origina dans un défaut commun au système de gouvernement dans toutes les colonies de l’Amérique Septentrionale. C’est la pratique de faire des allocations parlementaires pour des ouvrages locaux — système si vicieux, si fécond en maux, que je crois le gouvernement représentatif incapable de bien et doucement fonctionner dans ces colonies, jusqu’à ce qu’il soit entièrement déraciné.

Je ne connais, en vérité, aucune différence, dans la machine du gouvernement dans l’ancien et le nouveau monde, qui frappe autant un Européen que l’importance indue en apparence que parait occuper dans la législation Américaine l’affaire de la confection des ouvrages publics. En parlant du caractère d’un gouvernement, son mérite parait s’estimer par les travaux publics qu’il a effectués. Si on demande à un particulier comment sa propre législature a agi, il dira généralement quels chemins ou ponts elle a faits, ou négligé de faire, dans son propre district