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le loi, par ses propres résolutions, et cela aussi sur des points de la plus haute importance. On en trouve un exemple remarquable dans la résolution que l’Assemblée passa sur le rejet d’un bill pour rendre vacants les sièges des membres qui acceptaient des emplois sous la Couronne ; et qui, de fait et sans déguisement, avait pour objet de donner effet, de sa seule autorité, aux dispositions du bill rejeté. Cette résolution amena une longue querelle entre l’Assemblée et Lord Aylmer, qui refusa d’émaner un writ pour l’élection d’un membre à la place de M. Mondelet, dont le siège fut déclaré vacant en conséquence de son acceptation de l’office de Conseiller exécutif. L’instance dans laquelle l’Assemblée essaya ainsi de mettre en force ce principe de disqualification, se trouva être un cas auquel il ne pouvait pas être considéré applicable, soit par analogie pour la loi d’Angleterre, soit d’après l’intention apparente de la résolution elle-même ; car l’office que M. Mondelet avait accepté, quoiqu’il fût d’une grande importance et influence, était un office auquel n’était attaché aucun salaire ni émolument d’aucune espèce.

Mais les maux résultant de pareilles tentatives ouvertes de mettre de côté la constitution, étaient peu de chose, comparé au dérangement du cours régulier de la législation par l’abus systématique des formes constitutionnelles, pour priver les autres branches de la législature de toute autorité législative réelle. La coutume de passer les lois les plus importantes sous une forme temporaire est un défaut ancien et étendu dans la législation des colonies de l’Amérique Septentrionale, autorisé en partie par des instructions royales aux Gouverneurs, mais qui ne fut jamais sanctionné par la Législature impériale, jusqu’à ce qu’il fut établi dans le Bas-Canada par la 1ère Victoria, chap. 9. Il appartient, cependant, à l’Assemblée du Bas-Canada d’avoir réduit cette pratique ; un système régulier, afin qu’elle eût périodiquement à sa merci les institutions les plus importantes de la Province, et de se servir des besoins du Gouvernement et de la société pour extorquer la concession de toutes les demandes qu’il lui plairait de faire. Sujet à objection en lui-même, à raison de l’incertitude et des changements constitutionnels qu’il tendait à introduire dans la législation, ce système de lois temporaires tirait son caractère le plus répréhensible des facilités qu’il donnait à la pratique de joindre (tacking) ensemble diverses mesures législatives ; pratique qui n’est pas inconnue à la constitution Britannique, et qui a été trouvée utile quelquefois, parce que la prudence de la Chambre des Communes a rarement induit ce corps à y avoir recours, mais que les législateurs du Bas-Canada ont convertie en mode ordinaire de législation. Par l’abus de cette pratique, chaque branche de la Législature avait à chaque session le pouvoir, si elle en avait l’inclination, de faire du renouvellement des lois expirantes le moyen de dicter ses propres conditions aux autres ; l’Assemblée la convertit systématiquement à cette fin. Elle adopta la coutume de renouveler toutes les lois expirantes, quelque hétérogènes qu’elles fussent dans leur caractère, dans un seul et même Bill. Ayant le premier choix à exercer, elle ne renouvelait, comme de raison, que les actes qu’elle approuvait, et ne laissait au