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mourir un grand nombre de pauvres sauvages qui ne le connaissent pas. »

Le lendemain ou surlendemain selon les forces de l’enfant, il recommençait.

Souvent aussi, profitant d’un orage de pluie et de tonnerre ou que le vent soufflait en tempête produisant du bruit, peut-être pour amoindrir l’effet des cris de l’enfant ou impressionner ou rendre craintifs ceux de la tribu, il appliquait à celui-ci d’autres genres de supplices atroces.

Quelquefois il lui enfonçait des petites épines dans la tête, lui piquait avec des bois effilés les mains et les pieds pour en faire jaillir le sang, et lui infligeait le supplice des broches rougies au feu.

Enfin les souffrances avaient été telles que, le pauvre petit martyr en avait perdu la raison.

Il errait les yeux hagards, dans les grands bois, il s’en allait — faible et sans volonté — regardant autour de lui, craignant d’être repris par le monstrueux sorcier qui le faisait souffrir. Souvent on le trouvait adossé à un arbre les bras tendus en forme de croix, et il demeurait dans cette position des heures entières. C’est alors qu’il aurait fait verser des larmes de pitié à ceux qui auraient pu le voir, étendu, immobile, la figure pâle, amaigrie, vieillie avant l’âge, remplie de rides hideuses, reliques des privations et des souffrances endurées : il n’était plus qu’une loque, ruine lamentable.

Un jour, un parti de trappeurs traversa ce pays et passa la nuit avec les sauvages. Ils virent le pauvre Patira, qu’ils reconnurent pour un petit Canadien,