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4 SEPTEMBRE.

La femme d’un ouvrier, au bras de son mari, pénètre dans un groupe ; elle est pâle, frémissante :

— Vous le voyez s’écrie-t-elle, il faut encore du sang au boucher du Deux-Décembre ; il n’en a pas assez répandu ! Les gendarmes vont tirer sur nous comme en 1851. Ils m’ont logé une balle dans la tête sur le boulevard Montmartre ; je l’ai gardée et je la sens qui s’échauffe aujourd’hui !

Et, comme on écoutait, elle ajouta :

— J’avais quatorze ans, je sortais de l’atelier à mon heure ordinaire. Parce que j’étais blessée, ils ont arrêté mon père, en disant qu’on ne sortait pas ainsi dans les rues quand on se bat, si ce n’est pour se battre ! Les assassins ! Il faut se venger d’eux !

On entoure cette femme, que son mari retient dans la crainte qu’elle ne se précipite vers les gendarmes pour les défier. Elle s’adresse à la foule, elle énumère, un à un, avec une éloquence haineuse, tous les forfaits de Napoléon le Petit ; sa voix brève, ses paroles vigoureuses