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LE SIÉGE DE PARIS

martre, hâtons-nous ! les Prussiens marchent sur Laon. Tâchons d’utiliser les heures de répit que nous laisse encore l’ennemi victorieux. Si nous ne pouvons plus attaquer, au moins essayons de nous défendre ; si nous ne pouvons sauver la patrie, sauvons au moins l’honneur !

Vers dix heures, le boulevard depuis la rue Montmartre jusqu’au nouvel Opéra ressemble à un immense forum.

Au-dessus de toutes les têtes se dresse le spectre du Deux-Décembre. On revoit les morts sanglants de ce jour néfaste mêlés à l’hécatombe de Sedan. La haine, la violence débordent de tous les cœurs ; les menaces, les injures, les récriminations s’amoncellent sur Bonaparte. Traître ! lâche ! ces deux mots répétés par des milliers de voix forment une sorte d’accompagnement sourd, mal rhythmé, irritant, plein d’orage, aux paroles aiguës et vibrantes qui jaillissent de toutes parts.

Un mouvement de va-et-vient continuel agite cette masse inquiète, désespérée, dont le flot monte et s’enfle.