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LE SIÉGE DE PARIS.

Un monsieur prend ensuite la parole ; il parle imperturbablement durant une demi-heure sans rien dire, annonçant qu’il va se développer, qu’il conclura ensuite. Tout à coup le signor Cernuschi, avec la plus exquise politesse et son accent italien, l’interrompt : « Permettez, monsieur, c’est un peu long ! » Tout le monde éclate de rire. M. Chaudey me disait que rien ne pouvait rendre l’expression comique du visage de son ami en prononçant ces mots. La salle avait été prise d’une de ces folles gaietés que les nerfs donnent aux foules dans les grands événements. « Le bouffon, ajoutait-il est très accessible aux gens qui côtoient le sublime. » Cette pensée est vraie.

Je suppliai M. Cernuschi, membre de la commission des subsistances, de prendre en pitié les pauvres femmes qui font queue, sous la pluie, au froid, pendant une demi-journée, pour obtenir une maigre portion de viande. Ce dévouement-là de tous les jours est difficile ; d’autant plus difficile que c’est aux femmes les plus accablées de privations qu’il est imposé. Les hom-