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doués par notre père commun, mais enfin des membres de la grande famille du bon Dieu. Je veux parler de ces animaux, de ces chiens si fidèles et si bons serviteurs, que pour des gages mille fois supérieurs ils ne quitteraient jamais le maître indigent à qui ils sont dévoués ; de ces chèvres, de ces chevreaux, de ces brebis qui montent le soir jusque sur la crête de ce rocher pour me voir revenir de plus loin a la hutte, qui m’appellent comme s’ils comprenaient que leurs bêlements hâteront mon retour vers eux, qui s’élancent pour me faire fête aussitôt que j’ai traversé les champs cultivés et que j’entre dans les bruyères incultes où je leur permets de paître et de bondir en liberté ; de ces oiseaux qui m’ont vu, tout petits, sans plumes, respecter leurs nids et émietter mon pain pour les couveuses à portée du bec de ces mouches a miel à qui je laisse leur nourriture l’hiver et dont je ne prends un peu le miel que pour les malades ; de ces lézards que le bruit de la pierre sonnante sous le marteau comme une cloche attire au soleil, tout le jour, autour de moi, et que je n’écrase jamais sous mes pieds ; enfin de tous les plus petits insectes habitants des feuilles, des pierres ou des herbes, à qui je ne fais jamais de