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C’était le matin d’un dimanche ; je ne rencontrais personne dans les champs ; le jour était long devant moi je me retournais et je m’asseyais de temps en temps sur les racines d’un châtaignier pour jeter un long regard sur le bassin qui se creusait, de halte en halte, davantage sous mes yeux. Le soleil avait dépassé oisif la moitié du pan de ciel qu’il semble mesurer sur la vallée, et il penchait déjà un peu vers la montagne opposée, quand j’approchai de ce hameau ruiné des Huttes, d’où le tailleur de pierre recevait sans doute son nom. Je n’y étais pas monté depuis l’âge de onze ans, où ma mère m’avait retiré de la société des petits chevriers du pays pour me mettre dans le moule commun du collège, dans la société des régents, des écoliers et des livres. J’y montais une fois ou deux par an, à cette heureuse époque de mon enfance, avec les servantes de la maison, pour acheter des cabris au printemps et des châtaignes écorcées en automne, dans les deux ou trois cabanes qui composaient alors ce hameau.