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en voyant en songe toutes sortes de choses de la maison, que je ne pouvais plus effacer de mes yeux quand j’étais réellement réveillé. Je devenais encore plus silencieux que d’habitude ; je n’avais plus goût même à soulager celui-ci ou celui-là par mon travail, et, pour comble, je ne priais quasi plus le bon Dieu, ou du moins je ne m’entendais pas moi-même quand je marmottais mes prières. Oh ! ce fut un terrible temps de ma vie ! Je me repentis bien d’être venu si près, et je formai bien souvent la nuit le projet de retourner à Toulon ou à Bayonne, et de rester à jamais si loin, si loin, que je n’eusse pas la tentation qui me travaillait l’esprit. Mais, bah ! quand le jour revenait et que je revoyais la montagne, c’était fini, c’était comme si j’avais eu des semelles de plomb aux deux pieds ; je ne pouvais plus partir.

XI.

Voilà exactement comme je vivais pendant ces quinze malheureux jours, et plût à Dieu que j’eusse écouté la voix qui me retenait, au lieu d’écouter celle qui m’appelait aux Huttes. Mais Dieu sait le