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Me vois-tu ? — Est-ce toi, Denise, qui me réponds dans l’âme ? Dis-moi donc quand il plaira au bon Dieu de nous réunir. — Je suis bien impatient peut-être, n’est-ce pas ? C’est bien mal à moi de ne pas savoir attendre la volonté de là-haut, que tu sais, toi ! Mais la montagne est si seule sans toi ! Obtiens donc du bon Dieu qu’il ait pitié de Claude ? Denise ! Denise !… que la vie me dure ! Et quelques autres paroles confuses et entrecoupées comme celles-là. Puis, comme s’il eût eu honte de son impatience et comme s’il eût rougi de s’attendrir ainsi sur lui-même, il se leva, s’essuya les yeux, sourit tristement au soleil qu’il apercevait en haut sur l’extrémité du ravin, et remonta lentement la pente de mon côté. Je fis alors du bruit dans les feuilles et quelques pas, comme si je venais d’arriver seulement aux Huttes, et comme si je cherchais Claude vers l’enclos de roches. À ce bruit, il me reconnut, remonta tout à fait, me salua son bonnet à la main et ses cheveux au vent. Je lui serrai la main avec un sentiment d’amitié véritable, que je reconnus dans l’impression forte et confiante de sa propre main. Nous allâmes, en causant de la beauté de la saison et de la sérénité du jour, nous asseoir sous le