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ce ce que vous lui disiez vous-même dans ces rapprochements intérieurs qui vous rendaient si patient envers vous-même et si serviable envers les autres ?

Lui. — Ce qu’il me disait, monsieur, il me serait bien impossible de vous le redire car Dieu ne parle pas la langue des savants comme vous, ni le patois des simples comme moi. Je ne sais pas comment il se faisait entendre à mon faible esprit mais je l’entendais en moi, quand je me retirais du bruit de mes camarades pour l’écouter, comme nous entendons d’ici, monsieur, ce grand murmure général qui monte de la vallée, sans savoir si ce sont les personnes, les voix, les pas, les feuilles, les eaux, les plantes en germant, les oiseaux en chantant, les hommes en respirant qui le font mais nous savons que c’est quelque chose qui vit, n’est-ce pas, puisque ça bruit ?

Eh bien ! ce bruit sourd de la présence du Seigneur dans les créatures et en moi, je l’ai toujours heureusement entendu, comme je vous dis, et je dis heureusement pour moi, monsieur car sans cela je me serais pensé mort, j’aurais cru que ma poitrine était une bière ou l’on avait enseveli une âme qui