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ger et pastoral des plus fraîches vallées des Alpes. Quand on veut admirer, prier, rêver, on regarde les montagnes du côté du matin ; quand on veut espérer, envier, jouir, se recueillir dans les images d’une vie champêtre, on regarde les montagnes du côté du soir. Les unes sont un tableau de félicité sur la terre, les autres une échelle d’aspiration infinie au ciel, toutes deux une des plus belles toiles de la décoration du drame de la vie heureuse où s’est joué le pinceau du Créateur.

XI.

C’est là que j’habite depuis mon enfance, quand le flot de la vie, qui tarit et se renouvelle tour à tour sous moi, me laisse ou me ramène à ce premier bord de mon existence laborieuse et agitée. Je bénis les printemps, les étés, les automnes et même les rares hivers que j’ai pu y passer, depuis vingt ans, entre les souvenirs et les consolations du foyer. Hélas je n’y viens plus guère, depuis ces dernières années que pour y promener quelques heures mes pas pressés par les événements, pour y mesurer d’un regard rapide la croissance des arbres que j’avais