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lesquelles flottent au lever du soleil des flaques blanches de rosée ; puis quelques vergers entourés de haies de pruniers sauvages, sous lesquelles ruminent de belles vaches tigrées de noir et de blanc, dont on entend les mugissements mélancoliques répercutés de colline en colline. Deux ou trois petits hameaux a mi-côte au-dessus de ces terres et de ces vergers fument au-dessus des arbres potagers. Le regard franchit ces fumées et suit au delà, sur des pentes plus rapides, de profonds ravins creusés dans le sable rouge. De loin en loin on y aperçoit des chars chargés de fumier et tirés péniblement par des vaches blanches que le paysan conduit aux défrichements supérieurs, pour engraisser un peu ses avoines maigres ou ses orges tardives. D’autres descendent chargés de branchages de hêtres et de châtaigniers destinés a chauffer les fours où il cuit son pain. Les feuilles traînantes derrière les tombereaux balayent ces ravins comme le genêt de la ménagère balaye le seuil luisant de sa maison.

Ces chemins creux, pareils a l’ouverture des grottes, s’enfoncent et se perdent a l’œil, derrière les tournants des mamelons, dans la chair même de la montagne ou sous l’ombre des bois de châtai-