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ces bruyères, au bord de ces roches, dans cet enclos, quand j’étais petit, et surtout encore, ajouta-t-il plus tendrement, pour ces trèfles à fleurs roses et à feuilles pleines d’une goutte de rosée le matin, comme si elles avaient pleuré avec nous pendant la nuit, et qui poussent sur la terre de ceux d’autrefois !

Il y eut un léger serrement de gorge sensible dans son accent à ces derniers mots. Je ne fis pas semblant de m’en apercevoir. Il continua avec un ton de rustique mais véritable inspiration :

— Oui, monsieur, il n’y a pas une de ces étoiles là-haut, au ciel, qui commencent à se lever dans la demi-ombre, pardessus les roches ; pas une de ces cimes de montagnes, pas un de ces mamelons reluisants au soleil couchant, pas un de ces lits de ravines cachés dans les enfoncements de ces gorges avec leur eau qui dort ou qui bouillonne au fond, sous leur nuit, pas une de ces mottes de terre tournées et retournées par ma pioche au soleil, depuis mon enfance, pour lesquelles je ne me sente un fond d’attachement au cœur qui va souvent jusqu’à me faire pleurer quand je les regarde en remontant aux Huttes. Est-ce donc étonnant, que je me dis quel-