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III

Cependant, au milieu de ces tergiversations de la volonté royale, il est impossible à l’histoire de méconnaître que, dès le mois de novembre 1790, le roi méditait vaguement le plan d’une évasion de Paris combiné avec l’empereur. Louis XVI avait obtenu de ce prince la promesse de faire marcher un corps de troupes sur la frontière de France, au moment qu’il lui indiquerait ; mais le roi avait-il l’intention de sortir du royaume et d’y rentrer à la tête de forces étrangères, ou simplement de rassembler autour de sa personne une partie de sa propre armée dans une place frontière, et de traiter de là avec l’Assemblée ? La dernière hypothèse est la plus vraisemblable.

Louis XVI avait beaucoup lu l’histoire, et surtout l’histoire d’Angleterre. Comme tous les malheureux, il cherchait dans les infortunes des princes détrônés des analogies avec sa propre infortune. Il avait été frappé de ces deux circonstances : que Jacques II avait perdu sa couronne pour avoir quitté son royaume, et que Charles Ier avait été décapité pour avoir fait la guerre à son parlement et à son peuple. Ces réflexions lui avaient inspiré une répugnance instinctive contre l’idée de sortir de France ou de se jeter dans les bras de l’armée. Il fallait, pour qu’il se décidât à l’un ou à l’autre de ces deux partis extrêmes, que sa liberté d’esprit fût complétement opprimée par l’imminence des