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Elle dira : Un homme a paru dans l’Assemblée constituante inaccessible à toutes les passions, un des plus fidèles défenseurs du peuple. Il fallait estimer et chérir ses vertus, admirer son courage ; il était adoré du peuple, qu’il avait constamment servi, et, ce qui est mieux encore, il en était digne. Un précipice s’ouvrit. Distrait par trop de soins, cet homme crut voir le péril où il n’était pas et ne le vit pas où il était. Un homme obscur était là uniquement occupé du moment présent ; éclairé par d’autres citoyens, il découvrit le danger, ne put se résoudre à garder le silence, il alla à Robespierre, il voulut le lui faire toucher du doigt. Robespierre détourna les yeux et retira sa main ; l’inconnu persiste et sauve son pays… »

Robespierre sourit à ces paroles avec le dédain de l’incrédulité. Les gestes suppliants de Louvet et les adjurations des tribunes le laissèrent impassible à la séance du lendemain. Brissot reprit la question de la guerre. « Je supplie monsieur Robespierre, dit-il en finissant, de terminer une lutte si scandaleuse, qui ne donne l’avantage qu’aux ennemis du bien public. — Ma surprise a été extrême, s’écrie Robespierre, de voir ce matin, dans le journal rédigé par monsieur Brissot, une lettre dans laquelle se trouve l’éloge le plus pompeux de Monsieur de La Fayette. — Je déclare, répondit Brissot, que je n’ai eu aucune connaissance de la lettre insérée dans le Patriote français. — Tant mieux, reprit Robespierre, je suis charmé de voir que monsieur Brissot ne soit pas complice de semblables apologies. » Les paroles s’envenimaient comme les cœurs. La haine grondait sous les paroles. Le vieux Dusaulx s’élança entre les adversaires. Il fit un appel touchant à la concorde des patriotes et les conjura de s’embrasser. Ils s’embrassèrent. « Je viens