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L’Assemblée ne se trompa pas à ces manifestations. Elle y vit un dessein secret d’éluder des mesures plus sévères. Elle voulait y contraindre le roi, disons plus, la nation et le salut public le voulaient avec elle.


XII

Mirabeau avait traité la question de l’émigration à l’Assemblée constituante plutôt en philosophe qu’en homme d’État. Il avait contesté au législateur le droit de faire des lois contre l’émigration. Il se trompait. Toutes les fois qu’une théorie est en contradiction avec le salut d’une société, c’est que cette théorie est fausse ; car la société est la vérité suprême.

Sans doute, dans les temps ordinaires, l’homme n’est point emprisonné par la nature et ne doit point l’être par la loi dans les frontières de son pays ; et, sous ce rapport, les lois contre l’émigration ne doivent être que des lois exceptionnelles. Mais ces lois sont-elles injustes parce qu’elles sont exceptionnelles ? Évidemment non. Le péril public a ses lois propres, aussi nécessaires et aussi justes que les lois des temps de sécurité. L’état de guerre n’est point l’état de paix. Vous fermez vos frontières aux étrangers en temps de guerre, vous pouvez les fermer à vos citoyens. On met légitimement une ville en état de siége en cas de sédition ; on peut mettre la nation en état de siége en cas de danger extérieur compliqué de conjuration intérieure. Par quel