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êtes perdus, dit-il, si les membres de l’Assemblée se retirent de vous et passent en masse aux Feuillants. L’empire de l’opinion vous échappe, et ces innombrables sociétés affiliées, que votre esprit gouverne dans toute la France, rompront le lien d’unité qui les attache à vous. Prévenez les coups de vos ennemis. Faites une adresse aux sociétés affiliées, et rassurez-les sur vos intentions constitutionnelles. Dites-leur qu’on vous calomnie auprès d’elles, et que vous n’êtes pas des factieux. Dites-leur que, loin de vouloir troubler la paix publique, l’objet de tous vos soins est de prévenir les troubles dont la fuite du roi nous a menacés. Dites-leur que nous nous en rapportons à l’influence imposante et rapide de l’opinion. Respect pour l’Assemblée, fidélité à la constitution, dévouement à la patrie et à la liberté : voila nos principes ! » Cette adresse, dictée par l’hypocrisie de la peur, fut adoptée et envoyée à toutes les sociétés du royaume. Cette mesure fut suivie d’une épuration des Jacobins. On n’en laissa subsister que le noyau primitif, qui réorganisa le reste au scrutin. Pétion présida l’opération.

Les Feuillants, de leur côté, écrivirent aux sociétés patriotiques des départements. Il y eut un moment d’interrègne des factions. Mais bientôt les sociétés des départements se prononcèrent en masse et avec une explosion révolutionnaire presque unanime en faveur des Jacobins. « Union pure et simple avec nos frères de Paris, » tel fut le cri de ralliement de tous les clubs. Six cents clubs envoyèrent leur acte d’adhésion aux Jacobins. Dix-huit seulement se prononcèrent pour les Feuillants. Les factions sentaient le besoin d’unité, comme la nation elle-même. Le schisme de l’opinion fut étouffé par l’enthousiasme de la