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XVII

« Voyez, écrivait Desmoulins, voyez les satellites de La Fayette sortir furieux de leurs casernes ou plutôt de leurs tavernes. Ils s’assemblent, ils chargent à balle devant le peuple. Les bataillons d’aristocrates s’animent au massacre. C’est surtout dans les yeux de la cavalerie qu’on voit la soif du sang allumée par la douce ivresse du vin et de la vengeance. Cette armée de bourreaux en voulait surtout aux femmes et aux enfants. L’autel de la patrie est couvert de cadavres. C’est ainsi que La Fayette trempe ses mains dans le sang des citoyens, ses mains qui dégoutteront toujours à mes yeux de ce sang innocent. Cette même place où il les avait élevées au ciel pour lui jurer de le défendre !… Depuis ce moment, les meilleurs citoyens sont proscrits, on les arrête dans leur lit, on s’empare de leurs papiers, on brise leurs presses, on signe des tables de proscription. Les modérés affichent ces tables et les signent. Il faut purger la société, disent-ils, des Brissot, des Carra, des Pétion, des Bonneville, des Fréron, des Danton, des Camille ! Danton et moi, nous n’avons trouvé d’asile que dans la fuite contre nos assassins ! Les patriotes sont des factieux !… » — « Et il se trouve des gens, ajoutait Fréron, pour justifier ces lâches assassinats, ces délations, ces lettres de cachet, ces saisies de papiers, ces confiscations de presses ! et l’on tient huit jours suspendu aux bal-